Critique de “La vie suspendue”, Baptiste Ledan (♥♥♥♥♥)

Roman La vie suspendue

Temps de lecture : 2 min LITTERATURE
Baptiste Ledan chérit la littérature et les auteurs. Son premier roman « La vie suspendue », paru aux éditions Intervalles, est en soi un cri d’amour explicite, conduit par ce désir sous-jacent de se faire voix de leurs inspirations. Convoquer les auteurs français et étrangers les plus marquants du siècle passé dans cette fable satirique et fantaisiste est la démonstration d’une culture étendue qui se réinvente à l’aune de la reconnaissance et de la continuité. Dans ce roman original et philosophique, le temps est comme « suspendu » aux souvenirs qui se lassent sans possibilité de trépasser. Tomas Fischer est en deuil, il n’aspire qu’à se mettre en retrait de la société et de cette vie trop animée pour sa douleur inconsolable. Alors il part dans cet endroit où tout étranger ne peut qu’être en transit, sous peine d’expulsion. Cette ville se nomme Lasciate, elle est grise et triste comme l’ennui. C’est le lieu idéal pour supporter sa peine. Il s’y plaît tellement qu’il y restera, devenant ainsi clandestin. Ses quelques amis, étouffant sous leur âge canonique, se serviront de son empathie pour les délivrer de la vie.

“Ciel, ma belle-mère !”, du sang neuf pour une reprise hilarante

Temps de lecture : 3 min THÉÂTRE & CO
Le 14 mars 2019 sonnait la dernière de « Ciel, ma belle-mère ! », alors que le théâtre d’Edgar affichait complet tous les soirs. Covid-19 oblige. Depuis janvier 2022, ce vaudeville musclé et désopilant, de Georges Feydeau et Maurice Desvallières, est revenu dégourdir les zygomatiques des spectateurs. Joué pour la première fois en 1890 sous le titre « Le mariage de Barillon », ce texte en trois actes a été adapté par Emmanuelle Hamet qui propose une pièce moderne et jubilatoire. L’histoire est la même : Barillon, un quadragénaire bedonnant et pleutre, s’apprête à épouser une jeune fille de 20 ans qui en aime un autre… Mais, lors du mariage, une erreur de transcription de l’officier de l’état civil – gaiement aviné – acte que Barillon est marié à sa future ex-belle-mère, une femme extravagante aux sens échauffés par deux années de veuvage… L’affaire se complique avec le retour impromptu du supposé défunt mari, un pêcheur taillé dans un bloc de granit. Entre altercations, faux-espoirs et rebondissements, les comédiens complices et investis à 200 % semblent avoir un potentiel comique inépuisable !

Le coup de foudre de Samuel Labarthe pour Georges Perec

Affiche Les Soliloques de rachi

Temps de lecture : 4 min ÉVÉNEMENT
Samuel Labarthe se souvient de Georges Perec (1936-1982), comme d’un auteur virtuose, à la présence familière. Il se souvient de son visage, de ses yeux, de son sourire. Inoubliables. S’étonnant presque qu’il s’était éteint. Il avait lu « Je me souviens », un peu amorcé « Les Choses » (prix Renaudot 1965) sans le finir, et reporté « La Disparition » à plus tard tant il était obnubilé par la traque d’un « e » oublié par mégarde dans le texte. Des années plus tard, lorsque Jo Amar, le directeur de l’action culturelle du FSJU (encadré), et Patricia Hostein, directrice artistique du projet, lui ont proposé d’inaugurer le nouveau rendez-vous culturel, « Les Soliloques de Rachi », pour lire des extraits choisis dans l’œuvre de Georges Perec, le comédien n’a pourtant pas hésité. La commémoration des 40 ans de sa disparition (3 mars 1982) était l’occasion rêvée pour lui de refaire connaissance avec cet homme qu’il qualifie de « laborantin de la langue française ». « Parfois, on répond à des rendez-vous qu’on ne se serait pas forcément donné soi-même. N’est-ce pas la plus belle façon d’appréhender un auteur, ses univers, et de connaître l’homme et son travail ? », remarque-t-il, avec enthousiasme.

« Bécaud, on revient te chercher », Jacques Pessis et Claude Lemesle (♥♥♥♥)

Temps de lecture : 3 min LITTERATURE
Gilbert se croyait immortel. Bécaud l’est devenu. L’artiste aux 400 chansons, auquel même Piaf assurait qu’il chantait faux, a cassé la baraque de tous les superlatifs, par son sens du rythme, un travail acharné, un besoin viscéral d’être sur scène, d’être aimé de son public, et une énergie électrique qui soulevait la ferveur. « Monsieur 100 000 volts », l’avait surnommé un journaliste américain. L’homme qui pensait mourir centenaire s’est éteint le 18 décembre 2001, à l’âge de 74 ans. Pour commémorer les vingt ans de sa disparition, Jacques Pessis et Claude Lemesle ont uni leur tendresse pour cet immense chanteur, pianiste et compositeur en rédigeant à quatre mains une biographie tendre et éclairante, aux Éditions de l’Archipel. Le premier a été son ami pendant plus de trente ans et le second l’un de ses paroliers pendant plus de vingt ans. Estimant qu’il n’y avait pas eu jusque-là de réelle biographie, ils nous proposent de découvrir l’homme derrière le chanteur à la carrière incroyable. Ils nous le donnent à voir au quotidien, en coulisses, dans l’effervescence de la création, dans son appétit de vivre et d’aimer, dans ses angoisses aussi.

“5 jours de la vie d’une femme”, Evelyne Dress (♥♥♥♥)

Temps de lecture : 2 min LITTERATURE
Il y a toujours beaucoup d’Évelyne Dress dans ses écrits. Que ce soit dans ses romans, mais aussi dans « Mes chats » un bref éloge des félins qui l’ont choisie et accompagné sa vie et « Pour l’amour du Dauphiné », un récit amoureux sur cette région qu’elle affectionne. Dans son dernier roman, « 5 jours de la vie d’une femme », aux éditions Glyphe, l’auteure revient sur le thème de l’amour, mais à un âge réputé vénérable. 70 ans, est-ce la fin du désir et des douces palpitations de cœur ? Peut-on ou plutôt doit-on croire encore à la survenue d’un être rêvé ? Vous savez, celui qui vous arrache à la torpeur du quotidien et efface, par magie, toutes les désillusions ? À ses 70 ans, la narratrice fait le compte : une union désunie, des enfants ingrats, une ménopause qui renverse la vapeur, un miroir qui reflète trop bien la réalité et un cœur désespérément vide de sens. Au terme de ce constat, elle fait un choix complètement irréfléchi : elle part passer le réveillon de Noël au prestigieux Hôtel du Palais, à Biarritz. Il ne reste plus que la suite ? Qu’importe ! C’est une fortune pour ses revenus maigrichons, mais cette folie l’aiguillonne comme une évidence. Sa libido est à ce prix-là !

“Folle illusion”, osez osez Drag Queens

Temps de lecture : 3 min THÉÂTRE & CO
La Nouvelle Ève, à Paris, accueille jusqu’au mois d’avril, un show strass et paillettes, tout en folie heureuse et en audace artistique. « Folle illusion » est une troupe de Drag Queens aussi à l’aise en talons aiguilles que dans des baskets, qui dansent et chantent, imitant autant des vedettes de variété que du disco en passant par la pop. En chef d’orchestre de ce show de deux heures, Carolina. Figure notoire de la bonne humeur parisienne, frange rouge sur cheveux blonds, l’accent espagnol en pointe des pieds, elle s’impose par sa pétulance et ses réparties humoristiques comme la chef d’orchestre de ce divertissement. Osé en prouesse vocale et vestimentaire, aussi léger et pétillant que des bulles de champagne, ce show est tel de la poudre aux yeux -mais scintillante, cela va de soi ! – qui brouille tout jugement, toute stupeur, toute convention. Il sublime ce temps affreusement cartésien en le dilatant de rires et de joies. Le public ne s’y trompe pas. La « Folle illusion » déclenche l’inénarrable fièvre du samedi soir qui embrase cœurs et corps dans une frénésie contagieuse. Le bonheur n’est plus parqué dans le pré, il s’est niché dans ce cabaret du XIXe siècle et s’y est mis à l’aise, comme rentré au bercail.

“Mes adorées”, ou comment renaître de son histoire

Temps de lecture : 3 min THÉÂTRE & CO
« Lisse », « Lisse », bien trop « lisse » ! « Abîme-toi un peu ! », lui dit-on dans le milieu. La maturité dans le regard, l’authenticité accrochée au sourire, le comédien Édouard Collin n’a pourtant de lisse que le corps délié, que d’aucuns pourraient qualifier d’Apollon. Mais la plastique de celui qui joua « Panique au ministère » avec Amanda Lear est loin d’être son seul atout, car pour ce qui est du « cabossage », il en connaît un rayon ! Sa jeunesse est un parcours de « pumptrack(1) », une affolante variation de bosses et de creux, où le plat a eu du mal à se frayer un chemin. Ce parcours mouvementé, il nous le conte au travers de son premier seul en scène, « Mes Adorées » (Théâtre du Marais). Tout y est vrai, le comédien refusant l’approximation, le mensonge et les vérités arrangées. Dirigé en sobriété et sensibilité par la comédienne et metteure en scène Izabelle Laporte, il nous livre un texte intime, dense et captivant, où la légèreté et l’humour ne cèdent pas leur place. Son jeu tout en puissance et en fêlures éclate en une myriade de rôles. En une heure, l’artiste fait la démonstration magistrale d’un jeu, complexe, varié, en nuances, où l’essence de ce qu’il est affleure à la surface de sa peau… lisse, la faisant vibrer tel un tambour. Bien qu’interne, ce cri subliminal est émouvant, pudique, assourdissant de justesse.

Les mémoires du pilote René Metge sur la grille de départ

Temps de lecture : 4 min ÉVÉNEMENT
Jeudi dernier, le 24 février 2022, toute la profession du monde automobile s’était réunie chez le concessionnaire Range Rover, dans le quartier des Champs-Élysées, à Paris. On y fêtait un pilote dont le nom résonne toujours dans le cœur des amoureux des sports mécaniques, des grands espaces, des paddocks et des bivouacs. Il s’agit de René Metge, bien entendu ! L’ancien organisateur de rallyes publie aujourd’hui un livre de souvenirs sur le bon vieux temps, « René Metge – Pilote de 7 à 77 ans », chez LVEditions(1). « Souvenirs, souvenirs », comme aurait pu lui chanter à l’oreille Johnny Hallyday, lui qui avait partagé l’aventure du Paris-Dakar en 2002 aux côtés de son co-pilote, René Metge.

« Les saveurs du parler populaire – Florilège de mots croustillants et festifs », Daniel Lacotte

Temps de lecture : 2 min LITTERATURE
Un ouvrage de Daniel Lacotte, c’est comme une hirondelle qui revient chaque printemps. On l’attend avec impatience parce qu’elle annonce le renouveau. Avec « Les saveurs du parler populaire – Florilège de mots croustillants et festifs », paru chez Christine Bonneton, ce renouveau réside dans les mots et leurs associations qui forment les bons mots, qui nous rappellent, s’il le fallait, que notre langue est belle et vivante. Elle vivra encore longtemps, si on se donne la peine de la conserver au fronton de notre culture. Le français est en constante construction, se bâtissant à coups de néologismes, de dialectes, de patois et même de barbarismes. Parce qu’ils sont trop anciens, certains ont été mis au ban des cours d’école. Parce qu’ils sont trop récents, d’autres font des coudes pour prendre leur place…

“Very Math Trip”, la mission sacrée de Manu Houdart

Temps de lecture : 3 min THÉÂTRE & CO
Les langues vivantes, on connaît. En revanche, qui aurait accordé du crédit à l’existence des maths vivantes ? Pourtant, le Belge Manu Houdart nous le prouve A + B avec une énergie folle, lors de son spectacle au théâtre du Gymnase. « Very Math Trip » est un voyage ludique et pédagogique à travers le temps et les chiffres pour démythifier cette matière sur lesquels bon nombre d’entre nous ont buté, à un moment ou à un autre de notre scolarité. Que l’on ait été un petit génie ou un cancre, ou même une tête en l’air qui comprenait les maths ou pas selon le prof, ce spectacle est fait pour tous, petits et grands ! Prouesse incroyable de la part de ce prof de mathématique qui s’est donné pour mission d’être un vulgarisateur universel, non pas pour redonner aux maths ses lettres de noblesse, mais bien pour annoncer l’allégresse qu’elle procure et toute la poésie qu’elle recèle. Sous la direction de Thomas le Douarec (metteur en scène du spectacle Les Hommes viennent de Mars et les Femmes de Vénus), et avec une bonne dose d’humour, d’esprit et d’inventivité pour donner du sens à cette matière au premier abord rébarbative, Manu Houdart casse la baraque et nous dispense ses effets « Waooh ! » à foison.

“Nouvelle Babel”, Michel Bussi

Temps de lecture : 3 min LITTERATURE
Le roman de Michel Bussi est toujours très attendu. Pour le suspense. Pour la variété des personnages. Pour la complexité de l’intrigue et la fin toujours surprenante. Avec « Nouvelle Babel » (éditions Les Presses de la Cité), le lecteur est royalement servi, avec un petit supplément réjouissant : le voyage ! Géographe de formation, l’auteur s’amuse à nous promener autour de cette belle Terre à coups de téléportation. Est-ce l’heureuse conséquence des confinements successifs ? Quoi qu’il en soit, il nous plonge dans un monde utopique, en 2097, qui ne connaît plus la peur ni la guerre, depuis la nouvelle constitution mondiale établie en 2058, dont la devise est « Une seule Terre, un seul peuple, une seule langue ». Et la téléportation est l’assurance d’une liberté absolue, sans danger, car Panguaïa, la base de données des déplacements, y veille. Mais un jour, dix terriens retraités sur une île paradisiaque sont retrouvés assassinés. Les trois enquêteurs dépêchés sont sidérés par la violence des faits, mais surtout par la manière dont les tueurs ont opéré : froide, consciencieuse. De vérifications en investigations, l’enquête laisse présumer un coup d’État à venir. Ce qui n’arrange pas les affaires de Galileo Nemrod, le chef d’orchestre de ce monde idéal qui s’apprête à parachever la construction d’une tour de presque un kilomètre de haut pour fêter le centenaire de la téléportation. Son ambition ? Y rassembler la totalité de la population mondiale en un clic !

“Times Square”, un quatuor en Majestic

Temps de lecture : 3 min THÉÂTRE & CO
Manhattan. Un vieux loft new-yorkais. Matt Donovan (Guillaume de Tonquédec), un professeur d’art dramatique tout aussi défraîchi et craquelé que son appartement et qui noie ses illusions dans l’alcool. Robert Donovan (Marc Fayet), un homme mal marié, soumis à une vie trop terne depuis que son frère qu’il vénère refuse tous les scénarios. Sara « sans h » Bump (Camille Aguilar), une pétulante serveuse qui fait appel au professeur Donovan pour préparer le rôle de Juliette dans “Roméo et Juliette”, qui se donnera au Majestic. Tyler (Axel Auriant), un ex-GI au cœur pur qui cache ses troubles de stress post-traumatique dans le costume de Bunny. Ce quatuor improbable, aussi exubérant et loufoque que grave et tendre, a comme points communs une blessure non cicatrisée, le manque ou la perte de confiance en soi et la passion pour le théâtre. À la faveur de l’audition, ces quatre êtres vont se rapprocher, tenter de se tolérer, voire de s’apprivoiser. Merveilleusement soutenue par une écriture exigeante et intelligente, la nouvelle comédie de Clément Koch, « Times Square » (Théâtre Montparnasse) véhicule une puissance et une sensibilité d’égale intensité. Les répliques font mouche, les caractères antinomiques sont ciselés et leurs évolutions progressives. Les solitudes se frottent les unes aux autres avec bonheur, dans la fusion ou la scission, mais toujours avec l’ardeur des passions.

« La Mort en partage », Thierry Rocher

Temps de lecture : 3 min LITTERATURE
On connaît Thierry Rocher comme comédien, chroniqueur et humoriste français, notamment sur Paris Première à La revue de Presse, mais pas encore comme écrivain. Malgré le titre qui peut le laisser supposer, « La Mort en partage » n’est ni un thriller ni un polar. C’est un roman psychologique sur la perte d’êtres chers de manière abrupte, l’itinéraire d’une reconstruction qui en fait détruit. Pierre Chalet a perdu sa femme et sa fille unique lors d’un attentat perpétré par des terroristes islamistes. Lui qui appelait à ne pas faire d’amalgames s’enferre peu à peu dans une position radicale contre les musulmans tout en s’attachant à une musulmane, Jenna, une jeune comique talentueuse qui le pousse dans ses retranchements émotionnels. Pierre Chalet n’est pas à un paradoxe près…

“Benjy Dotti, The Late Comic Show​”, le trublion du rire ultra

Temps de lecture : 3 min THÉÂTRE & CO
« En toute simplicité et pour pas cher ! », tel est le mantra de Benjy Dotti dans son dernier spectacle « The Late Comic Show », à l’Alhambra, lieu culte du Music-hall. Seriné à l’envi, repris par un public embarqué dans son délire, cette litanie en clin d’œil annonce les sketchs suivants. Pendant un peu plus d’une heure, l’artiste multicarte tend à prouver – par dérision bien entendu – qu’il peut remplacer les plus grands du showbiz, avec le même effet et à moindres frais ! Ne déviant pas de cette colonne vertébrale, il valse entre imitations et caricatures, chansons et détournements de vidéos, parodiant notamment l’actualité (le pass vaccinal, la Covid-19, la SNCF…). Les vannes sont corrosives, décalées, impudentes, grivoises. On adore rire de tout, mais surtout du pire ! C’est bien connu. Avec Benjy Dotti, on est servi à volonté. L’énergie et le mordant en « open bar », il professe un humour qui n’attente à aucune pudeur, si ce n’est les fausses… quoi que. Les sketchs très variés s’enchaînent en rythme et en rupture, notamment par des adresses aux spectateurs qui en prennent aussi pour leur grade… surtout celui qui a été désigné comme étant le benêt d’un soir qui comprend les blagues à retardement. On ressort content de cette immersion en milieu déjanté. Mais surtout content de ne pas avoir été le bouc émissaire d’un soir, même pour rire !

“Les Écuries de Diomède”, Sylvain Larue

Temps de lecture : 3 min LITTERATURE
Avec son sixième tome historico-policier, « Les Écuries de Diomède » (éd. De Borée), Sylvain Larue nous plonge dans l’univers du cirque sous le Second Empire. Le vol d’un étalon, l’enlèvement d’un enfant et trois assassinats amènent nos agents très spéciaux, Léandre Lafforgue, alias le Goupil, et Phèdre du Teil, à infiltrer le milieu du cirque. L’idée est excellente, le résultat passionnant. Le roman prend toute son ampleur et de sa saveur lorsque nos deux héros se muent en saltimbanques pour démasquer le ou les coupables parmi la troupe. Leur efficacité en tant que policiers n’étant plus à prouver, les voici qui s’illustrent avec entrain dans les arts circassiens. À travers eux, l’auteur nous donne à voir et comprendre le quotidien de ces nomades au XIXe siècle. Avec force détails historiques, il nous entraîne dans les coulisses de la vie d’un cirque et soulève le toit du chapiteau, où règnent solidarité et entraide, mais aussi jalousie et coups bas. Fait particulier de cette époque, l’exposition de curiosités humaines (des sœurs siamoises, un homme-tronc, un homme-crocodile, une femme sans bras…) qui faisaient le bonheur des badauds avant le spectacle.

“Les Producteurs”, un grand cru classé Michalik

Temps de lecture : 4 min THÉÂTRE & CO
Exit « Les Producteurs », le film culte du grand Mel Brooks (1968) ! La version d’Alexis Michalik au Théâtre de Paris est un millésime exceptionnel, qui fait pétiller les yeux et les synapses, incurvant dans le même temps les zygomatiques entre sourire béat et rire franc. Tel un grand cru classé, la comédie musicale se vit avec délectation et ravissement sans un soupir… sinon d’aise ! Que l’on ait vu le spectacle original ou pas, le plaisir est neuf, intense, mémorable, comparable à l’émotion provoquée par « Edmond » (Théâtre du Palais royal jusqu’au 2 juillet 2022). Espérons que ce show musical d’Alexis Michalik reste longtemps à l’affiche, tout comme ses autres créations (Edmond, Le Cercle des illusionnistes, Le porteur d’Histoire, Intra-muros, une histoire d’amour). Même s’il n’a pas écrit le scénario de ce producteur ruiné qui imagine une arnaque à l’assurance en montant la pire comédie musicale, l’artiste a mis un fabuleux grain de sel dans le ballet que forme la mise en scène. Une signature inimitable qui bouleverse et ravit par alternance. Par les temps qui courent, ce petit bonheur de deux heures est un précieux bouclier contre la morosité et le marasme ambiants.

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