« Happy Hour », l’heure qui rend vraiment heureux

Temps de lecture : 2 min THÉÂTRE & CO
Avec « Happy Hour », c’est de la bonne humeur en barre, du rire en open bar. Vous n’êtes même pas à l’abri de vous voir servir un verre de votre choix ! Avant de fouler les planches, Daniel Camus était propriétaire du « Bahia bar » pendant cinq années, de 2004 à 2009. L’endroit de toutes les rencontres, certains comme clients d’un soir, d’autres comme piliers de comptoir. De cette expérience riche d’anecdotes et de personnalités, l’humoriste en a construit un one-man-show drôle et émouvant, qui a le don d’attraper au vol des bribes de temps où l’insouciance était reine.

“Un prénom en trop”, Christophe Carlier

Temps de lecture : 3 min LITTERATURE
Après Patrice Quélard pour Place aux immortels, Christophe Carlier est le deuxième lauréat du Prix du roman de la gendarmerie nationale, avec « Un prénom en trop », paru chez Plon. Cet agrégé de lettres classiques et docteur ès lettres à la Sorbonne nous offre avec son dernier ouvrage un aller simple dans les méandres de la perversité, une romance acide et démoniaque passionnante. Ce prénom en trop est Rebecca. Une brillante jeune femme dont la beauté racée provoque la fascination. Son apparente froideur dans une boîte de nuit à Toulon excitera la convoitise d’un homme, au physique banal et au cerveau malade. À la suite de ce coup de foudre unilatérale, il cherchera qui elle est et la pistera jusqu’à Annecy, où elle vit. Il la traquera avec une cruauté jubilatoire, la tyrannisant par petites touches, avec lenteur calculée. Il fait durer le plaisir pour qu’elle soit hantée par lui. Il se nourrit de l’épier, de la suivre, de lui laisser des cadeaux empoisonnés dans sa boîte aux lettres, sur son pare-brise, sur son lieu de travail. Il vampirise sa vie jusqu’à la rendre folle d’angoisse. Violette, la nouvelle collègue de Rebecca, qui lui voue d’emblée – elle aussi – une adoration sans borne, fera son possible pour la rassurer, la protéger, l’aider même. Elle la convaincra de porter plainte. Mais le psychopathe est prudent, il prend son temps, il savoure son emprise ; il hisse même sa proie sur l’autel de la divinité en assassinant d’autres Rebecca par amour pour elle. Peu à peu l’étau se resserre… mais pour qui ?

“Mon fils” – Au nom d’un père fantôme

Temps de lecture : 4 min THÉÂTRE & CO
Prisonnier de son histoire, Srul Sheinaog est le dernier du nom, sa famille ayant été entièrement exterminée. Volontairement apatride au sortir de la Seconde Guerre mondiale, il s’est fait appeler Jacques Duflot. Cet homme qui a survécu à la Shoah est resté seul avec sa peur de survivant, comme il l’expliquera à Pierre Lefrançois, le fils qu’il a refusé de reconnaître soixante ans plus tôt. Dans son testament, il demande à ce fils de le veiller une nuit, comme le veut la tradition juive. Une nuit fantomatique pendant laquelle deux êtres aux déchirures béantes vont s’opposer, s’apprivoiser et se pardonner. Dans « Mon fils », bouleversante pièce écrite, mise en scène et co-interprétée par Erwan Szejnok Zamor (au théâtre de la Contrescarpe jusqu’au 25 juin), la transmission d’un héritage familial et culturel est en jeu. Question universelle s’il en est, elle prend une dimension d’autant plus poignante lorsqu’il s’agit de celle d’un peuple martyr ayant souffert de la barbarie nazie. Mais une réconciliation est-elle possible, même par-delà la mort ?

“La Déraison”, Agnès Martin-Lugand

Temps de lecture : 2 min LITTERATURE
L’amour est-il plus fort que tout ? Se peut-il qu’il soit déraisonnable au point de s’égarer ? Agnès Martin-Lugand y apporte une réponse poignante avec son nouveau roman choral « La Déraison », paru aux éditions Michel Lafon. Écrit en miroir, ce roman d’absolu, d’amour en suspens, de destins contrariés met en scène deux êtres parvenus à un point crucial de leur vie. D’un côté, il y a Madeleine, une femme au dernier stade d’une maladie incurable. Avant de quitter ce monde, elle veut profiter de ces derniers instants avec sa fille Lisa dans la demeure familiale où elle n’est plus revenue depuis si longtemps. Elle veut lui raconter qui elle était vraiment avant sa rencontre avec son père, avant sa naissance. D’un autre côté, il y a Joshua, un homme alcoolique aux idées suicidaires, mais qui ne parvient pas à passer à l’acte. En proie à ses démons, ce compositeur et pianiste réputé vit en ermite, hanté par le passé. Seul son fils Nathan a le pouvoir, par sa présence attentive, de le faire reculer dans son désir d’en finir. Dans ce roman, l’auteure livre les émotions brutes de deux êtres à la dérive, dans lesquelles s’est cristallisée la déraison, chacun sous une forme différente. À coups de phrases courtes et rythmées, elle nous plonge au plus profond des douleurs psychologiques pour en extraire l’essence vitale. Celle qui fait avancer l’Homme. L’amour.

“Noces de corail” – L’amour en fusion qui ne laisse pas de glace

Temps de lecture : 3 min THÉÂTRE & CO
Chronique de l’inconcevable annoncée. Il ne s’agit pas d’une mort, mais de deux. Celle d’un petit ange atteint d’une maladie rare. Celle d’un couple que la douleur et les larmes font imploser à mesure que s’évanouit l’espoir de guérison de leur fille Agathe. « Noces de corail » est une comédie dramatique, à la fois brutale et émouvante, où la poésie tient haut le flambeau pour ne pas l’obscurcir avec l’ombre du pathos. L’histoire est belle et déchirante, comme toutes celles qui relatent la maladie incurable d’une enfant et le parcours de soins. Agathe souffre de calcification du cerveau. Pour nous l’expliquer, l’auteure Laure Loäec choisit l’analogie du corail. Comme on sait, le corail est constitué de polypes vivant en symbiose avec leur environnement. Pour freiner l’invasion, l’auteure imagine le froid comme antibiose. L’amour fusionnel, intense et tendre d’un couple y résistera-t-il ? Peut-il sortir indemne de l’épreuve ? Telle est la véritable question de cette pièce que la mise en scène éthérée, sobre et suggestive, de Frédéric Thibault, Zakariya Gouram et Laure Loaëc, sublime et élève au-dessus de la couche de tristesse.

« Un fil à la patte », un plaisir redoublé sous la direction de Christophe Lidon

Temps de lecture : 3 min THÉÂTRE & CO
Amateurs de portes qui claquent, de courses-poursuites, d’éclats de voix et de coups d’éclat, vous serez servis. La comédie de Georges Feydeau en trois actes, représentée pour la première fois en 1894, au théâtre du Palais-Royal, à Paris, est un inclassable. Joué et rejoué, parfois surjoué, à user la corde du suspense, mais jamais les cordes vocales. Au théâtre Hébertot, c’est un vaudeville transposé dans les années 50, sur fond jazzy et de music-hall, que le metteur en scène Christophe Lidon nous propose de redécouvrir (création au théâtre Montparnasse en 2018). Pour réinventer un Feydeau, qui ne compte pas parmi les plus affûtés, mais qui est archi connu, il fallait faire preuve d’une créativité audacieuse. Transposer à une époque ne suffit pas, évidemment. L’artifice de réinvention doit avoir du sens, une valeur ajoutée, servir la pièce pour la porter encore plus haut. Un défi qu’a relevé haut les mains Christophe Lidon avec une scénographie incluant des images vidéo en fond de scène prolongeant les décors et le jeu hors plateau. Ainsi, une fenêtre du salon du château de la baronne Duverger donne sur l’allée gravillonnée. Avant l’entrée des invités, nous assistons à leur arrivée, qui en voiture d’époque, qui à bicyclette, qui à pieds. Cet effet astucieux de passer du live à la vidéo, et vice versa, étire l’action tout en instaurant une respiration de quelques secondes… avant le retour à l’effervescence. Le tout soutenu par une bande-son jazzy qui fait danser les rires !

« Le laboureur et les mangeurs de vent : liberté intérieure et confortable servitude », Boris Cyrulnik (éd. Odile Jacob)

Temps de lecture : 3 min LITTERATURE
Un titre emprunté à la fable qui oppose d’emblée deux principes dans l’énoncé. C’est intrigant et incitatif. Avec « Le laboureur et les mangeurs de vent : Liberté intérieure et confortable servitude » (éd. Odile Jacob), il n’est pas question de cigale et de fourmi, ni d’autres animaux issus du bestiaire imaginaire de La Fontaine, mais de deux catégories de personnes dont la construction psychique a pris des chemins divergents. Dans cet ouvrage édifiant et passionnant, Boris Cyrulnik s’est interrogé sur le besoin d’un individu d’être sous emprise. Qu’est-ce qui le pousse à faire abstraction de toute réflexion propre pour se conformer à la doxa sans émettre le moindre doute ? Qu’est-ce qui pousse un peuple en difficulté à rechercher un « sauveur » et à s’y fier aveuglément ? Garder sa liberté intérieure de pensée est-ce si pénible, si angoissant, qu’il faille la remettre entre d’autres mains ?

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