PORTRAIT PASSION
par Nathalie Gendreau
Agence éditoriale depuis 2009, Macha Publishing rejoint le cénacle des éditeurs en septembre 2015. L’amour des livres libres de toute attache partisane, une curiosité pour les auteurs à la plume authentique, nuancée, incisive, un intérêt sincère pour l’amitié historique franco-russe. Dotées de ces qualités, la directrice de Macha Publishing Marie Renault ne tardera pas à s’imposer dans l’arène de l’édition avec ses propositions d’ouvrages sur des sujets d’actualité ciselés, des beaux livres en “réalité augmentée”, des romans contemporains ouverts sur le monde et des textes coquins oubliés d’écrivains classiques français.
Le 29 septembre 2015 est une date qui compte dans l’histoire de l’agence éditoriale Macha Publishing et dans le cœur de sa fondatrice Marie Renault. C’est l’acte de naissance du département “édition” et la concrétisation du rêve inouï d’une jeune femme habitée par la passion de la littérature, des livres de belle facture, et des plumes aiguisées à l’intelligence, à la mémoire et au labeur. Des plumes qui viennent surtout de l’Est, d’une Russie où souffle un courant littéraire dense et varié, épris de liens, comme le caractérise la parution du premier livre “Ukraine, un déchirement fratricide, de Viacheslav Lashkul“.
Portée sur les fonts baptismaux de la curiosité, de l’ouverture, de la tolérance et de la compréhension de l’autre, la maison d’édition grave dans le marbre sa signature, explicite et personnelle : “Les livres, un pas vers la liberté“. La liberté de découvrir, la liberté d’apprendre, la liberté de s’ouvrir au monde. La ligne éditoriale de Macha Publishing est de publier une littérature divertissante et enrichissante, mais qui ose aussi se saisir de l’opportunité de présenter l’envers du décor, un autre angle de vue. “J’aimerais aider à faire changer d’avis en rappelant les faits historiques, souligne-t-elle, non sans se dire troublée par cette propension à oublier l’Histoire, y compris celle du début du XXe siècle.
Pour servir cette ambition d’ouverture sur le monde, les éditions Macha Publishing visent tous les publics, se refusant d’emblée à restreindre sa diffusion à un sérail élitiste. C’est pourquoi les collections se nourrissent au fur et à mesure de belles rencontres avec des auteurs talentueux et de partages sans frontière ni tabou. Par exemple, Marie Renault se déplace au minimum quatre fois par an en Russie, où elle a installé une agence-relais pour être au plus près des auteurs russes, et les inciter à se déplacer en France pour des événements littéraires, comme pour le Salon de Paris. “Les retours ont été formidables, s’anime l’éditrice. Il est paru beaucoup d’articles en Russie sur Macha Publishing, d’autant que la venue de Andrei Astvatsatourov, un écrivain intellectuel adulé en Russie, ou de Narinai Abgaryan, a déplacé du monde sur notre stand.” Par ailleurs, elle ne relâche pas sa veille pour dénicher l’histoire à raconter, avec tel auteur, pour lancer tel nouveau projet éditorial. Et elle étudie tous les manuscrits avec intérêt. Là encore, aucune œillère, le coup de cœur est un guide. Tant que l’histoire est forte ou que le sujet offre un regard nouveau, tant que la plume est belle et originale, Marie Renault ne s’interdit pas d’y répondre favorablement… même si l’auteur n’est pas russe.
Ainsi, en un an d’activité, la première collection “Autres regards sur le monde” s’est étoffée de trois titres offrant une analyse pointue et fouillée géopolitique et historique sur l’Ukraine, Cuba et la Syrie. S’est ajoutée une collection plus ludique, plus érotico-ludique devrait-on dire, « Trésors retrouvés de la littérature » (5,90€) qui propose déjà trois titres, trois auteurs classiques qui ont discouru de la “chose” de bien belles manières. Celles de Jean de la Fontaine ou de Balzac sont croustillantes et audacieuses au possible, et surtout inédites. Entre ce grand écart d’intérêt, on y trouve de la littérature classique russe d’auteurs confirmés (“Souvenirs dans les poches” de Andrei Astvatsapourov ou “Dans mon cœur à jamais” de Narinai Abgaryan), de la littérature jeunesse avec “Le garçon qui parlait au dauphin” de Ginny Rorby (auteure des États-Unis) ou encore de la science-fiction avec “Katastropha” de Sergej Tarmashev. Sans oublier “Trésors de l’Ermitage“, un ouvrage somptueux qui rassemble les chefs-d’œuvre de joaillerie des tsars. Petit plus appréciable, il est vendu avec une application smartphone ingénieuse qui permet de découvrir les bijoux en réalité augmentée.
Avec ce catalogue limité à une vingtaine de titres par an, la fondatrice de Macha Publishing veut s’inscrire dans une approche commerciale de qualité. L’investissement en temps et en énergie de la directrice et de la petite équipe de cinq personnes est la même pour chacun des projets. Pour Marie Renault, il n’est pas question de privilégier la quantité à la qualité. Elle souhaite en cela suivre la démarche des éditions XO, un modèle en soi, apportant une attention fine sur chacun des ouvrages mis en avant, se battant pour chacun d’eux avec la même énergie.
Dès sa naissance à Moscou, Marie Renault a reçu en héritage la passion de la littérature instillée progressivement par un grand-père rédacteur en chef du quotidien Izvestia, une grand-mère correctrice dans ce même journal national et une mère professeur de français pour les étrangers. “J’ai appris le français à sept ans en intégrant une école bilingue franco-russe, confie Marie. La question ne se posait pas à la maison. Une jeune fille russe de bonne famille se doit de savoir parler français et jouer du piano. C’est d’ailleurs un usage qui perdure depuis le XVIIIe siècle !”
Avec cet environnement favorable, Marie se dirige vers des études littéraires et rentre à la faculté de lettres à l’université d’État Lomonossov à Moscou. Puis, à dix-huit ans, elle réussit le concours d’entrée à la Sorbonne Paris-IV, permis grâce à un échange universitaire par l’intermédiaire d’une association d’amitié franco-russe, où elle se spécialise dans l’édition. Son stage pratique chez Hachette Jeunesse lui offre la possibilité d’intégrer l’équipe. “J’ai eu beaucoup de chance d’y être restée après mon stage, estime l’éditrice confirmée. C’est une très bonne école. C’est là que j’ai appris mon métier, en participant à toute la chaîne éditoriale, depuis la sélection des contenus jusqu’à la transformation du projet en livre.” Après neuf ans chez Hachette Jeunesse, elle travaille ensuite trois ans à Orinis en tant qu’éditrice.
En 2009, Marie Renault franchit le pas de la liberté, pour la conquérir et en vivre, en créant l’agence éditoriale Macha Publishing, avec une associée mais qui s’est retirée peu après. “Le moment était venu, à 35 ans, de m’investir dans un projet, déclare-t-elle, simplement. Je voulais voler de mes propres ailes. C’est un besoin. J’étais consciente des risques encourus, mais lorsqu’on travaille on ne se pose pas trop de questions.” L’éditrice propose ainsi des prestations de packaging international, de l’édition de contenus de presse, de livres et de site internet, des supports de communication, du conseil éditorial… Et pour ce faire, elle s’est entourée d’une soixantaine de professionnels comprenant des auteurs, illustrateurs, photographes et designers.
C’est confortée par six ans de bonne marche de son agence éditoriale que Marie Renault s’est lancée dans l’édition, sur un créneau ajusté à ses ambitions. Gageons que son dynamisme, son enthousiasme et ses audaces éditoriales participent à l’érection de ponts entre les cultures et les courants littéraires, et permettent d’offrir un espace de liberté à des auteurs talentueux pour exprimer une pensée plurielle, un autre regard, une réalité vécue.
Pour en savoir plus, vous pouvez consulter le site de Macha Publishing.
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