“La croisière, ça use”, une pêche miraculeuse

Temps de lecture : 3 min

 

THÉÂTRE & CO 

Avis de PrestaPlume ♥♥♥♥

La nouvelle comédie d’Emmanuelle Hamet “La croisière, ça use !” est un voyage au long court chahuté de rires et de surprises. Un skipper de pacotille doit convoyer un voilier de Tanger à Ibiza. C’est ainsi que deux marins d’eau douce et deux passagères aux personnalités bien tranchées se retrouvent sur le Hakuna Matata, en pleine tempête, sans eau, sans vivres et sans radio. Bâtie sur un scénario basique, la pièce prend toute sa valeur avec les réparties qui claquent aux vents contraires. La mer démontée fait chavirer le scénario dans l’enchaînement des catastrophes. Les passagers, chacun arrimé à son objectif de départ, vont traverser la tempête dans un déferlement de situations loufoques et irrésistibles, jusqu’au point de rupture. Une croisière, ça use forcément à ce rythme de tous les diables. Sous une mise en scène énergique et synchrone de Luq Hamett (également Directeur du théâtre), Éric Massot, Marie-Aline Thomassin, Émilie Marié, Lionel Laget souquent ferme et bien, sans perdre le nord. Cette pêche d’enfer tient du miracle. Alors, plus d’hésitation, embarquement immédiat au théâtre Edgar !

Dans un beau décor de cabine de bateau (Claude Pierson), Antoine (Eric Massot) se frotte les mains. Le temps du voyage de Tanger à Ibiza, il est le maître du Hakuna Matata, un voilier qui a besoin d’une sérieuse révision. Pour agrémenter la traversée, il a passé une annonce non équivoque pour recruter des coéquipières de préférence belles et non farouches. Alors qu’il découvre l’état de délabrement du bateau, la première coéquipière ayant répondu à l’annonce dégringole les escaliers avec fracas, des chaussures de ski aux pieds. C’est Alex (Lionel Laget), un homme, au grand désappointement d’Antoine. Alex est en fait un truand maladroit et complexé, qui est chargé de trouver le chargement de drogue censé être planqué sur le plaisancier. Puis arrive la plantureuse Joanna (Marie-Aline Thomassin), un adjudant-chef qui vient de déserter l’armée de l’Air en raison d’un chagrin d’amour. Antoine ne goûte guère sa virile féminité ni son féminisme exacerbé, et espère en la quatrième passagère qui ne tarde pas à débouler, la démarche chaloupée, moulée dans une émoustillante robe rose bonbon. Mélanie (Émilie Marié) est une sublime caricature de la jeunesse hyper connectée baignant dans son monde de télé-réalité syncopé de hashtags et de smileys. Son rêve est de participer à l’émission “La maison des secrets“, qui consiste à taire son secret le plus longtemps possible, secret qu’elle dévoile aussitôt par étourderie.

Inspirée de “La Croisière s’amuse“, série culte dans les années 80, “La croisière, ça use” tient toutes ses promesses. L’auteure Emmanuelle Hamet se lâche avec ses personnages et les situations granguignolesques qu’elle leur impose. Aucun des quatre comédiens n’est épargné. Et c’est tant mieux. On retrouve le tandem d’amis Éric Massot et Lionel Laget qui ont joué récemment avec Tex dans le drôlissime “Monsieur Nounou“. Leur jeu est un trésor de nuances, où le burlesque le dispute à la naïveté, l’une aussi touchante que l’autre, l’autre aussi désopilante que l’une. Lionel Laget est particulièrement époustouflant de vitalité cascadeuse. Il dévale les escaliers, tombe dans des bras inhospitaliers, se cogne partout et hurle à la manière d’un Gérard Jugnot son infinie tristesse d’être un truand non pris au sérieux. Marie Aline Thomassin est furieusement crédible en force de la nature, prête à en découdre, qui se révèle au fil des avaries du bateau un cœur qui ne demande qu’à être pris à l’abordage. Quant à Émilie Marié qui incarne une jolie tête de linotte, elle est remarquable de vivacité printanière et de pétulance de jeu. Ses réparties ponctuées d’un hashtag et d’un smiley hilarants donnent à cette pièce, déjà bien charpentée, une tonalité de cartoons à laquelle il est impossible de résister. Mais qui le voudrait ? On craque pour cette comédie qui, à mesure que se profile la menace du truand et du gros grain, surfe sur une risée de plaisir et d’agrément.

Nathalie Gendreau


Distribution

Avec Éric Massot, Marie-Aline Thomassin, Émilie Marié et Lionel Laget.

Créateurs

Auteur : Emmanuelle Hamet

Mise en scène : Luq Hamett

Musique : Christian Germain
Décors : Claude Pierson
Construction : Les Ateliers Décors 

Du mardi au samedi à 21 heures, et par alternance à 19 heures. Une matinée un dimanche sur deux à 17h30, jusqu’au 4 février 2018.

Au Théâtre Edgar, 58 Boulevard Edgar Quinet, Paris 75014.

Durée : 1h20.

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