“Tant qu’il y a de l’amour”, à mourir de plaisir !

Temps de lecture : 3 min

 

THÉÂTRE & CO 

Avis de PrestaPlume ♥♥♥♥

Avec « Tant qu’il y a de l’amour », au théâtre de la Michodière, c’est l’amour avec un grand « M » comme mortel ! C’est celui de Jean et de Marie qui s’effiloche à l’usure des habitudes et qui fait bifurquer leur cœur de sa ligne droite. Jean ira vers Inès, une jeunette tombée en pâmoison pour lui. Marie ira vers Paul, un veuf pharmacien tombé en sidération pour elle. L’amour peut tuer au sens propre comme au sens figuré. Marie persuadera son amant de l’aider à tuer son bougon de mari qui ne veut pas lui rendre sa liberté. La nouvelle comédie de Bob Martet part dans ce délire romantique avec une écriture rythmée à couper le souffle, soutenue par une mise en scène d’Anne Bourgeois exigeante d’exactitude. Elle permet aux quatre comédiens de s’insérer au millimètre dans cette harmonique du rire, donnant aux situations comiques et aux gags un relief croustillant à souhait !

Jean (Patrick Chesnay) se sent comblé par une vie routinière à la mécanique bien huilée. Il se couche avec sa femme Marie (Marie-Anne Chazel) le soir et il fait la sieste avec sa maîtresse Inès (Valérie Bègue). Ce double mi-temps lui convient et il n’entend pas en changer. Le soir, il tient à sa fidélité qu’il malmène sans regrets la journée et dont, par pure honnêteté, il ne fait aucun mystère à sa femme. Mais Marie ne supporte plus le « sourire souffrant » de son mari. Elle aime désormais Paul (Laurent Gamelon), un veuf-pharmacien qui lui a « ouvert les volets », et elle n’entend pas les refermer de sitôt. Entre Jean qui ne veut rien changer et Marie qui veut tout changer, les ennuis vont pleuvoir ! Un matin, Marie lui réclame sa liberté pour aller vivre avec son amant. Comme Jean refuse tout compromis, Marie forme un projet de couple original : tuer son mari. À contrecœur, son amant pharmacien lui concocte un poison. C’est Marie qui va l’administrer. L’attente leur est insupportable, surtout que le couple infernal devra recommencer plusieurs fois cet éprouvant passage à l’acte… qui leur coûte tellement, au final.

On ne dira pas si Marie et Paul parviennent à leurs fins, toujours est-il que les temps morts, eux, ne sont pas de la partie. L’amour veille à mener le jeu tambour battant, le cœur léger et tempétueux, à un rythme frénétique, à commencer par les trois décors escamotables d’Édouard Laug qui coulissent à distance sans fausse note. Les réparties coulissent aussi à merveille, elles fusent avec la passion tantôt acide, tantôt enfiévrée, mais toujours avec une touchante sincérité qui désarme. On en viendrait à plaindre les personnages qui s’escriment à défendre leur pré carré au prix d’immenses sacrifices. Tuer par amour c’est romantique, mais ce n’est pas très légal. Le bonheur futur peut-il s’épanouir sur le souvenir d’un assassinat ? À peine l’idée traverse-t-elle l’esprit que le comique de situation se renforce lorsque l’amant et le mari deviennent amis. En filigrane de la pièce délicieusement licencieuse, la conscience émerge de temps à autre dans une hésitation ou un remord.

Les comédiens ne baissent pas les armes une seconde pour faire croire à leur personnage. Patrick Chesnay balbutie, bougonne, tangue et tressaute avec une conviction drolatique chevillée au corps. Mention spéciale pour Marie-Anne Chazel qui joue avec un pied cassé. Difficile et courageux, dans son cas, de courir d’un bout à l’autre de la scène au bord de la syncope ou de lever langoureusement la jambe dans les ébats amoureux. Laurent Gamelon est attendrissant dans l’amant raide dingue qui répugne à donner le « bouillon de onze heures » à son rival. Par peur de perdre la femme qu’il aime, il consent mais se rassure dans des embrassades exaltées et très pressantes. Quant à Valérie Bègue, Miss France 2008, elle n’a aucun mal à se mettre dans la peau de la maîtresse au corps voluptueux qui fait perdre la tête à Jean. Sa vitalité et sa sincérité rend totalement crédible son personnage sincèrement épris. Avec ces comédiens au tonus infaillible, la comédie burlesque « Tant qu’il y a de l’amour » prend un tour fatalement mortel !


Le Club des Millefeuilles reçoit la metteur en scène Anne Bourgeois autour d’un dîner gastronomique, littéraire et artistique à la Ferme Saint-Simon le mardi 10 octobre 2017.



« Tant qu’il y a de l’amour »

Auteur : Bob Martet

Distribution : Patrick Chesnais, Marie-Anne Chazel, Laurent Gamelon et Valérie Bègue.
Mise en scène : Anne Bourgeois
Assistance de mise en scène : Betty Lemoine et Sonia Sariel

Décors : Edouard Laug
Costumes : Cécile Magnan
Lumières : Laurent Béal
Musique : François Peyrony
Accessoires : Flore Guillemonat

Crédit photos : William Let

Au théâtre de la Michodière, 2 rue de la Michodière, Paris II.

Du mardi au samedi à 20h30, matinées le samedi à 16 h30, matinées le dimanche à 15h30.

Jusqu’au 12 novembre 2017.

Durée : 1h30.


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