“Si Cupidon savait viser”, Alice Hérisson et James Harrington

Temps de lecture : 3 min

 

Extrait

“Avec une autre fille, très mignonne d’ailleurs, son surnom était “Petite chatte intrépide” – sans commentaire -, on était les seuls à pouffer de rire en voyant le gourou présenter ses exercices. Je ne sais pas pourquoi, mais dès que je l’ai vue, j’ai instantanément craqué sur cette fille. Blonde, de grands yeux bleus, un air espiègle, enfantin, une fée… Je m’égare… Bref, on passait notre temps à se marrer en entendant les conneries de l’autre enturbanné. Mais on a vite été rappelés à l’ordre. Quand deux molosses en tunique jaune vous encadrent et vous toisent d’un regard noir, ça fait passer l’envie de se marrer. Ici, c’est le spirituel par la force. Tu te plies et du pries…” (page 187)

 

Avis de PrestaPlume ♥♥♥♥

 

Ah  ! si Cupidon savait viser, il y aurait moins de ruptures… Vraiment  ? Alice Hérisson et James Harrington, les auteurs de « Si Cupidon savait viser », s’amusent follement à passer la quête de l’âme sœur au scanner de la révolution numérique. À l’aube de ce troisième millénaire supposé spirituel, c’est le marché de l’amour qui est brossé sans complexe dans cette comédie romantique très mutine et drôle. Dans cette histoire construite à deux voix, les deux auteurs portent un regard personnel sur leur manière de vivre une même situation. Il est plaisant – voire très instructif – de connaître la perception des deux protagonistes esseulés qui essayent, parfois contraints et forcés par leurs proches, souvent à leurs risques et périls, de trouver l’amour avec un grand A. Le seul, l’unique, le rare. S’il faut payer de sa personne, Alice et James ne reculent devant rien  : sites de rencontres, relooking, speed dating, boîtes de nuit très spéciales, labyrinthe de l’amour, séminaire de libération des chakras… et j’en passe. Au-delà du traitement résolument humoristique, cette réflexion disséquant les rencontres 2.0 est glaçante  !

Illustratrice dans une agence de publicité et dessinatrice de BD en devenir, Alice se fait larguer brutalement. Elle n’a rien vu venir. C’est la descente aux enfers et les remises en question. James, lui, est conseiller client dans un centre d’appels télécom dans l’attente d’accomplir son rêve d’ouvrir un magasin de disques-café. Il est anglophobe par accident familial et célibataire par timidité, mais il est prêt à changer. Selon sa mère, il doit faire évoluer sa façon d’être s’il veut rencontrer une jeune fille gentille, douce et avec qui il se sente bien. Chacun d’eux a un meilleur pote qui l’entraîne dans sa folie rivalisant, nuit après nuit, de plans, pour la plupart pourris, pour provoquer la fameuse rencontre tant espérée. Ayant les mêmes sorties, Alice et James se croisent et se recroisent, mais se loupent et se loupent encore jusqu’au jour où un séminaire de l’amour va les rapprocher grâce à leur instinct de survie qui les pousse à fuir ce séminaire qui s’avère au mieux une escroquerie, au pire une secte. Mais quand Cupidon réussit enfin à les réunir, le doute s’insinue avec son florilège de quiproquos  !

« Si Cupidon savait viser » est une comédie romantique qui a toute sa place dans l’actualité du désert affectif. Le temps de la solitude, des ruptures brutales, des rencontres virtuelles étend son voile sombre sur les relations. On est très loin de l’époque des mariages arrangés ou des rendez-vous chevaleresques  ! On entre de plain-pied dans la recherche éperdue de son alter ego, un être qui réponde à tous les critères informatiques et aux exigences parfois contradictoires. L’histoire écrite à deux mains pour ce chassé-croisé amoureux impertinent et drôle est une excellente idée. Le lecteur vogue entre les pensées de l’un et de l’autre sur un même événement. La répétition de cet événement importe peu, car il se colore d’une émotion différente, d’une réaction inattendue. L’homme et la femme sont attendrissants dans leur quête qu’ils vivent comme la dernière tentative. Après, advienne que pourra  ! Décidément, Cupidon semble se délecter des rendez-vous qu’il leur fait manquer. On le remercierait presque, puisque le récit va crescendo, prend de la puissance, se complexifie jusqu’au dénouement irrésistiblement drôle. Pour clore le chapitre, le lecteur trouvera le quiz « Loose & Love » avec des questions pour découvrir quels romantiques nous sommes. Préparez vos stylos  !

Nathalie Gendreau

 

Éditions de Saxus, 14 février 2019, 317 pages, à 19 euros.

 

Retour page d’accueil

 

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.

Pin It on Pinterest