“Prends ma main”, Virginie Gouchet, City Éditions

Temps de lecture : 3 min

Extrait (page 118)
“Peter Pan avait besoin d’une pensée agréable pour s’envoler. Moi, je ne sais pas voler ! Je sais nager par contre, mais parfois, je bois un peu la tasse… Il paraît que je réfléchis trop, ou que je m’efforce de ne pas le faire, alors pendant ce temps, j’oublie de bouger les bras et les jambes pour rester à la surface. Alors, plutôt que de fuir les endroits où il y a de l’eau, je vais essayer de patauger là où j’ai pied et heureusement, je vais avoir de l’aide.
Bouée de sauvetage n° 1 : ma sœur Céleste. Ne jamais l’oublier.”

“Prends ma main”, Virginie Gouchet, City Éditions

Avis de PrestaPlume ♥♥♥♥

Professeure des écoles, Virginie Gouchet signe son premier roman avec « Prends ma main », chez City Éditions. De facture classique, il n’en est pas moins tendre et délicat dans la description d’une relation entre sœurs. Des sœurs fusionnelles, à défaut d’être jumelles, mais qui laisseront pourtant leur différence les séparer une fois adultes. À l’annonce du cancer de sa sœur Danaé, Céleste prend les choses en main. Déterminée à l’aider à traverser cette épreuve, elle dépassera le silence gêné qui s’est immiscé entre elles. Que de temps gâché en non-dits, en fierté mal placée ! La maladie fera l’effet d’un électrochoc. Pour l’une comme pour l’autre. L’une déployant des trésors d’inventivité pour soutenir le moral de sa sœur malade. Le tendre lien qui unit les sœurs se renforcera par petites touches pudiques, jusqu’à revenir à son état originel, pur et sincère. Neuf de nouvelles aventures. Avec ce roman, aussi frais que profond, l’auteur évoque la maladie, sous le prisme de l’optimisme, le bonheur de la maternité et la blessure de son absence, mais aussi la jalousie et la compétition dans une fratrie.

Résumé

Céleste est infirmière, un métier qui la passionne depuis toujours et dans lequel elle s’accomplit. Elle est mariée et mère d’un petit garçon. Elle nagerait dans le bonheur, si ce n’était la froideur des relations avec sa sœur cadette. Danaé est reporter de guerre, elle fait l’admiration de sa famille, elle est audacieuse et intrépide, mais seule et sans enfant. Une blessure qui la pousse à s’étourdir avec le danger. Les sœurs s’envient mutuellement de ce qu’elles n’ont pas. Un jour, Danaé apprend qu’elle a un cancer. Elle se tourne alors vers Céleste, celle qui n’aurait cessé d’être près d’elle si la jalousie et la rancœur n’avaient distendu leurs liens. Dès l’appel au secours de sa cadette, Céleste s’engagera dans une course contre la montre pour combattre les ravages psychologiques de la maladie. Elle fera preuve d’inventivité et d’audace pour que Danaé garde le moral. Sachant que le moral est une aide précieuse pour supporter le traitement, elle dresse une liste d’activités à faire de toute urgence. Chacune étant plus folle, plus inattendue, plus réjouissante que l’autre, à la limite parfois de la légalité, comme s’inviter à un mariage huppé ou passer la nuit sur une île déserte… La plus timide et casanière des sœurs se révèlera maître en organisation d’événements propres à doper le moral !

Pour approfondir

Le roman de Virginie Gouchet est une ode à la relation entre sœurs, mais aussi à la vie. Cette vie chèrement préservée par l’amour fraternel. La maladie est l’élément détonateur qui rapprochera Céleste et Danaé, gommant leurs brouilles, les réduisant à des broutilles enfantines. Les souvenirs de chacune, marchant main dans la main, à travers leur journal intime, éclairent leur tempérament, leur compétition incessante, même dans la relation avec leurs parents. Le cancer les réunira pour faire face à l’adversité, mais elles se retrouveront également face à elles-mêmes, seules avec leurs jalousies à l’égard de l’autre, chacune faisant un pas vers la réinvention de leur relation. Cette relation complexe évolue graduellement, au fil des week-ends surprises passés ensemble. Les forces et les faiblesses des sœurs s’inversent pour finir par s’équilibrer. Un équilibre narratif qui vacille cependant devant l’insistance de l’auteure sur l’autoflagellation fraternelle systématique qui met en avant la honte a posteriori des sœurs d’avoir été jalouses l’une de l’autre. Heureusement, au moment des aventures insolites que l’une concocte pour l’autre, le rythme s’accélère et estompe cette insistance. L’enjeu nourrit le suspense et donne à vibrer jusqu’à la fin. Un roman lumineux d’optimisme qui fait la part belle aux rires et aux émotions qui chantent.

Nathalie Gendreau

City Éditions, 21 octobre 2021, 320 pages, à 17, 90 euros.

1 réflexion au sujet de « “Prends ma main”, Virginie Gouchet, City Éditions »

  1. L’amour “fraternel” ou “sororal”, (les deux termes sont corrects), pour qualifier ce lien invisible qui unit les âmes de deux sœurs, est un trésor de la nature que les scientifiques ne pourront jamais disséquer. Je l’espère en tous cas.

    Manifestement Virginie Gouchet, a trouvé le ton juste pour exprimer cette émotion impalpable qui nait au cœur des fratries transcendant les inévitables compétitions ou jalousies dont l’enfance est souvent le théâtre. Compétition qui disparait souvent avec l’âge, le nouveau parcours individuel ou de nouvelles amitiés qui entrainent les sœurs, ou les frères, dans des voies différentes et parfois opposées.

    Et puis survient l’improbable, parfois l’innommable (dans le roman c’est un cancer), et les liens distendus retrouvent miraculeusement leur vigueur éternelle.

    Virginie Gouchet a donné pour titre à son premier roman « Prends ma main ». Cette main, Nathalie Gendreau de Presta Plume l’a saisit et nous passe le relais pour un nouveau plaisir littéraire, que l’on espère toujours renouvelé.

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