“Ma grammaire fait du vélo”, à vos marques, prêts, riez !

Temps de lecture : 3 min

 

THÉÂTRE & CO 

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Avis de PrestaPlume ♥♥♥♥♥

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Grammaire et orthographe, le couplet gagnant dans la course au bon français. Mais un casse-tête casse-pieds pour les élèves en queue de peloton. Ah ! S’ils avaient assisté à ce « Ma grammaire fait du vélo », spectacle éblouissant de François Mougenot sur les mots et leurs savantes combinaisons, ils auraient appris en riant… ou ri en apprenant ! Ce seul en scène humoristique au théâtre de l’Essaïon est exemplaire de la manière dont le corps enseignant devrait faire aimer la langue de Molière. L’auteur et comédien, sans esbroufe ni emphase, fait don de ces leçons de rattrapage, cocasses et absurdes, à la manière d’un Devos ou d’un Morel. Ses textes sont fins, percutants, intelligents et irrésistiblement drôles. Il réconcilie même le public – s’il le fallait – avec la grammaire, si joueuse quand on prend la peine de la titiller. Conjugaison, pronoms personnels, phrases historiques, onomatopées : tout est bon pour doper le langage et le faire caracoler au cœur des discussions. Car, de nos jours, c’est le parler « tendance » qui s’impose dans cette obsession à la modernité, écorchant les mots et les oreilles du premier puriste qui passe.

François Mougenot avance sur la scène, avec ses livres de grammaire dans une valise et l’esprit joueur sur la ligne de départ. Pour seul décor, une table. Méthodiquement et en silence, il empile en pyramide ses doctes ouvrages qu’il contemple avec satisfaction. Puis se tourne vers le public, la mine inspirée. Juché sur les mots tel un athlète de haut niveau, il se la joue en danseuse, passant du français châtié – comprendre « correct » – au français « tendance », c’est-à-dire celui qui est pratiqué dans la précipitation, dans l’abandon des règles et des usages, à l’arrache, branché… « djeun ». La traduction en simultané du bon et piètre français est une promenade de santé pour tout coureur au cœur bien accroché à l’effort. En fait, c’est une mise en jambes pour la respiration, ce qui est essentiel quand le rire s’invite dans la course ! Bien échauffé, François Mougenot attaque le col de la grammaire avec les pronoms personnels, où « le tu est partenaire de je », puis avec « l’accord des on ». Au passage, il n’oublie pas de chantonner un « Au clair de la lune » qu’il revisite à la façon « tendance ». Inoubliable !

« Ma grammaire fait du vélo » est un bonheur à toutes les étapes de ce tour de France de la grammaire. Une récréation à prendre comme un cadeau, car tout est sujet à s’arracher les côtes de rire. François Mougenot transmet sa passion des mots et leurs liaisons pas si dangereuses que cela, finalement, quand on fraternise avec leurs contradictions, exceptions et autres irrégularités. Après cette épopée en sa compagnie dans la rigueur de la grammaire, le français devient un allié qui aide à gravir tous les cols de montagne, sans chuter dans les erreurs ni se prendre des bâtons dans les roues. Le comédien déroule à un rythme accéléré une verve étonnante qui fait appel à une attention sans relâche, pour ne rien manquer de la performance. Nos neurones ne chôment pas, nos zygomatiques itou. Généreux de jeux de mots et autres calembours, il ne porte aucun jugement, il distribue encore moins les bons points : il s’amuse pour notre seule distraction. Il jongle avec les mots, en équilibre sur son vélocipède intellectuel nommé « grammaire ». Il les confronte et les marie, dans une mise en scène ludique de Caroline Darnay. Grâce aux arrangements musicaux d’Hervé Devolder, il pousse le jeu jusqu’à chanter, tel ce refrain tissé d’onomatopées. Une virtuosité qui fait le régal de l’esprit. Avec François Mougenot au guidon, on referait bien le chemin à l’envers de notre scolarité. C’est dire !

Texte et photos : Nathalie Gendreau


Distribution

Avec : François Mougenot

Créateurs

Auteur : François Mougenot
Mise en scène : Caroline Darnay
Arrangements musicaux : Hervé Devolder
Lumières : Anne Gayan

Production : L’Impertinente
Co-production : Pierre Delavène (DSCP) 

Tous les samedis à 17 h 30 jusqu’au 27 avril 2019.

À l’Essaïon, 48 rue du Faubourg Saint-Martin, Paris Xe.

Durée : 1h15.

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