“Le sommeil le plus doux”, de Anne Goscinny

Temps de lecture : 2 min

 

Résumé

“Son sourire aujourd’hui me donne envie de découvrir le monde. Elle oublie, je le vois, l’échéance des trois jours. Elle oublie que le temps est compté, elle oublie l’ombre et son murmure. Il fait doux, Nice ouvre ses cadeaux. Il n’y a personne dans les rues. Je marche, enveloppée dans un caban trop large. Je ne pense qu’à ma mère. Je sais que la parenthèse se referme sur nous. Ma promenade, au gré du vent, au gré de rien, me conduit dans un joli jardin. Je m’assieds sur un banc, déboutonne mon manteau. Je respire. Trois pastels et mon carnet vont immortaliser le bleu, le vert et l’ocre. C’est alors que je remarque cet homme. Il est là, tout près, assis sur un banc. Il me regarde. Il se lève. Vient vers moi.” A. G.
C’est à Noël, sous le soleil d’hiver, qu’Anne Goscinny réunit une mère et sa fille pour un dernier voyage. Un roman poétique et personnel.

 

Avis de PrestaPlume ♥♥♥♥

Le sommeil le plus doux”, de Anne Goscinny, est un roman qui brille par son élégance. L’élégance des mots alliée à l’élégance de l’esprit. L’alliance est magnifiée par des phrases à la musique poétique chargées d’émotions et d’images aux couleurs pastel. L’écriture délicate est une lente respiration, celle de deux femmes d’abord, d’une mère et de sa fille qui s’acheminent vers une séparation définitive, sous l’œil compatissant d’une grand-mère qui s’égare dans ses souvenirs. Puis celle d’un homme qui s’interroge sur sa relation avec sa femme qui s’éloigne dans son monde intérieur, éclaboussé de peintures abstraites.

Une autre respiration s’invite, plus intense, souffreteuse et chaotique, celle de la mort qui trépigne, à l’affût derrière le masque livide de la maladie. Un indésirable, un parasite, un pique-assiette qui coupe l’appétit et l’espoir. Sous la plume dénudée de Anne Goscinny, le cancer apparaît comme un personnage, capital, qui unit et désunit deux êtres, grignotant leur vie depuis que Jeanne est enfant. Si ce mal n’est pas contagieux, elles sont deux à en crever. Cette réflexion empruntée à Jeanne dessine tout le drame qui se noue jusqu’à la libération dans tous les sens du terme de l’une et de l’autre… Un passage initiatique d’un monde vers un autre, pour l’une et pour l’autre.

C’est la période de Noël. Dans un hôtel, à Nice, au bord de la mer. Pendant ces trois jours de festivités désertées par la joie, les souvenirs refluent, les confidences se bousculent par vagues entre deux pics de douleur. C’est le cadeau d’une mère à sa fille unique, une manne d’amour dans laquelle Jeanne pourra puiser pour survivre au deuil. À cette fusion maladive. Telle une récréation à la tristesse, une réparation à la solitude, une rencontre imprévue se profile pour Jeanne et Gabriel. Ils se remarquent dans un jardin public. Ils s’apprivoisent du regard, se plaisent, s’épanchent, puis se réconfortent. Avec lui, sa parole se libère. Avec elle, son désir se ravive. Une osmose guidée par le don de soi. Intégralement. Sans fard. Sans adieu.

Un roman ciselé de tendresse pour un sommeil qui s’annonce éternel, construit à deux voix. Deux histoires intimes qui alternent, aux battements de cœur réguliers, et qui se chevauchent jusqu’au point ultime où la révélation ordonne la composition des temps. Passé, présent, futur n’existent plus, l’auteure trempe sa plume dans l’encrier de l’intemporalité pour décrire l’accomplissement des destins. Des vies écartelées. Des souvenirs réunifiés… C’était à Nice, au bord de la mer du Nord.

Éditions Grasset, avril 2016, 464 pages, 13,50 € (version papier) et 9,49€ (version numérique)

[wysija_form id=”2″]

 

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.

Pin It on Pinterest