« Le Compagnon idéal », Isabelle Minière

Temps de lecture : 2 min

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Eva est une rêveuse invétérée. Éveillée ou endormie, ses rêves l’habitent en permanence. Ainsi peut-elle jouer à habiter sa vie, donner le change. Tout est comédie, mais elle passée maître dans l’illusion, la dissimulation. Son entourage la trouve réservée, parfois mélancolique, voire renfermée, mais sympathique et très serviable. Alors qu’elle se désespère d’être comprise et aimée pour ce qu’elle est, Éva rencontre Jeff – ou Jimmy, selon les jours –, le frère de sa patronne, Cloé. Il est l’exact opposé de sa sœur  : gentil, ouvert, drôle, attentif, compréhensif. Il a toutes les qualités requises aux yeux d’Éva qui n’ose tomber sous le charme de peur de se réveiller dans la dure réalité d’être rejetée. Mais l’homme est charmant et le restera. Ils vivront même le confinement ensemble dans le petit appartement d’Éva. C’est le bonheur complet, inédit, caché, jusqu’à ce que leurs familles respectives les harcèlent de questions et empiètent sur leur liberté. Celle d’Éva la tient pour instable et craint pour sa santé mentale. Celle de Jeff – ou de Jimmy – est bien trop possessive. Ces inquisitions familiales réussiront-elles à menacer l’équilibre fragile de ce beau rêve qui a pris corps dans la vie d’Éva ?

Avec « Le Compagnon idéal », paru chez Serge Safran Editeur, Isabelle Minière n’a pas écrit une simple histoire d’amour, une rencontre fusionnelle entre deux êtres faits l’un pour l’autre. Mais l’histoire d’un sauvetage  : celui d’Éva par elle-même, par un instinct de survie inespéré que le confinement entretiendra. Au contact de cet homme idéal, la jeune femme qui se débat avec la vie va se métamorphoser, tel le papillon sortant de sa chrysalide, en femme heureuse et lumineuse, plus vivante que jamais, prête à tout pour réaliser ses rêves de bonheur. En dépit des autres. Psychologue et hypnothérapeute de formation, Isabelle Minière nous donne à entendre la voix de cette jeune femme fantasque et vive, à laquelle on s’attache, et à laquelle on peut s’identifier. L’auteure tresse finement les fils du fantasme inconscient que le confinement nourrit et cultive. L’écriture sensible, à l’encre des émotions, est aussi alerte et pétillante que l’héroïne. Quelques saillies, drôles et cruelles, dépeignent des relations sociales exacerbées, que la distanciation physique imposée fera imploser. Et si ce chaos relationnel collectif – et a fortiori individuel – était l’occasion « idéale » d’un apaisement, d’un retour à soi sincère ? « Le compagnon idéal » en est une belle démonstration, certes fictive mais éloquente.

Nathalie Gendreau

Serge Safran Editeur, 15 avril 2022, 176 pages, à 16,90 euros.


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