“La Vallée des oranges”, Béatrice Courtot

Temps de lecture : 2 min

 

Extrait

“Anaïs veillait à conserver ce patrimoine d’autrefois dans sa pâtisserie. Elle-même avait disposé des boîtes de couleur sur ses étagères en bois, et des bocaux de confiseries sur le comptoir d’entrée pour le plus grand bonheur des enfants. Son arrière-grand-mère aimait lui décrire les senteurs oubliées : la naphtaline du marchand de couleurs, le tabac à rouler, les Gitane en papier de maïs, l’odeur de l’ensaïmada chaude et dorée à peine sortie du four.” (page 55.)

 

Avis de PrestaPlume ♥♥♥

 

Depuis cinq ans, les éditions Charleston organisent le Prix du Livre romantique qui offre la publication à un manuscrit sélectionné par un jury présidé par Marie Vareille. Cette année 2018 voit la distinction de La Vallée des oranges, premier roman de Béatrice Courtot. Pour être retenu, le récit doit se couler dans la ligne éditoriale de l’éditeur, c’est-à-dire une histoire mettant en scène une héroïne fière, forte et libre. Pour ce cru-là, elles seront deux, unies par les liens du sang et la passion de la pâtisserie. Cette romance à deux voix est la rencontre d’Anaïs et de Magdalena que deux générations séparent. Une rencontre qui va mener la première sur les traces de la seconde, une courageuse arrière-grand-mère, résistante durant la guerre civile à Majorque, en 1936.

S’il n’y avait pas eu la découverte d’une boîte dissimulée dans le faux plafond d’un hôtel en rénovation à Marseille, la vie d’Anaïs se serait écoulée entre la solitude d’un cœur à aimer et son affaire à Paris, le Café de l’Ensaïmada, réputé pour ce gâteau typique de Majorque. Seulement voilà, le destin veille et entrouvre parfois un chemin aux âmes curieuses et en quête d’un passé enveloppé d’un silence douloureux. Cette boîte renferme des souvenirs de son arrière-grand-mère dont elle ne sait presque rien, si ce n’est qu’elle a quitté son île de Majorque pour immigrer en France. Dans quelles conditions, elle l’ignorait.

En 1935, Magdalena vit près du village de Sóller, dans une finca (ferme) héritée de sa famille qui cultivait les orangers depuis des générations. Jeune pâtissière, pleine d’entrain et de talents culinaires, elle confectionne ces brioches majorquines à la fleur d’oranger entortillées et saupoudrées de sucre glace appelées “ensaïmadas“. À peine est-elle mariée à Jaime que la guerre civile éclate en Espagne, répandant fureur et atrocités. Elle s’engage alors dans la résistance, avant d’être contrainte de s’enfuir dans une frêle embarcation pour ne plus revenir. Le cœur et les souvenirs à jamais étreints dans un passé où s’affrontent lumière et ténèbres, mais d’où s’échappe pour toujours le parfum de l’orange.

La Vallée des oranges se singularise par son sujet, original et dépaysant, qui enjambe deux époques, où deux générations de femmes au tempérament volontaire affrontent leur destin. D’une écriture immédiate et fluide, l’histoire se dénoue au rythme des allers et retours spatio-temporels, entre passé et présent, entre Paris/Marseille et l’île de Majorque. La narration est très visuelle, les images s’imposent d’elles-mêmes balançant entre le brouhaha d’un Paris qui ne se repose jamais et l’atmosphère apaisante d’une île encore marquée par son histoire. L’auteur en fait une restitution à la fois sensuelle et savoureuse, car elle accorde une grande part à la gastronomie, aux traditions et à la culture. L’intrigue mêle histoires d’amour et de secrets de famille marchant de pair avec fougue, doublée d’une dimension historique passionnante qui s’impose en chef d’orchestre : elle donne le ton, le rythme et la flamme à une plume alerte et timide… à l’image de ses deux héroïnes, Magdalena et Anaïs.

Nathalie Gendreau

 

Éditions Charleston, avril 2018, 232 pages, à 18 euros.

 

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