“Huis presque clos”, des équilibristes sur le fil de l’impro

Temps de lecture : 3 min

 

THÉÂTRE & CO 

Avis de PrestaPlume ♥♥♥

Ce soir-là, au théâtre de Dix Heures, ils étaient quatre pros de l’improvisation, prêts à relever le défi de situation proposé par le public. Car, lorsque Sébastien Barat, Romain Cadoret, Fabien Strobel et Julie Mori montent sur scène, ils arrivent les mains dans les poches… enfin l’expression « les mots dans les poches » serait plus juste ! Ces mots encore inconnus d’eux, que l’aventure démange et qui s’impatientent de fuser. Le top départ  est sur le point d’être lancé. Le public a choisi. Les quatre personnages vont se retrouver dans un sex shop pour un Huis presque clos qui entend emporter l’adhésion. Chaque mercredi soir, à 21 h 30, c’est le risque. Mais un risque au cordeau qui tend son fil pour offrir à ces équilibristes du théâtre en création live cette liberté dont ils ont besoin pour explorer leur large palette d’expressions. La seule contrainte narrative étant de rester sur une unicité de temps et de lieu. À cela s’ajoute une mise en scène de Vincent Ronsac qui joue sur le minimalisme, comptant sur la performance scénique des comédiens. Seules quatre chaises servent l’histoire qui se fabrique sous des yeux ébahis et sonne aux oreilles de l’enfance.

Ainsi, on est projeté dans un sex shop. Ça tombe bien ! Dans le quartier de Pigalle, où se situe le théâtre, ils sont légion. Même avec très peu d’imagination, on s’y croit ! Et cette mise en situation promet en elle-même bien des rebondissements savoureux et des débordements cocasses. L’attente est au taquet ! Il y a une chaise pour la charmante caissière (Julie Mori), qui est là en dépannage, dans l’attente d’une meilleure situation. Sur les deux autres chaises Joël (Sébastien Barat) dont on comprend assez vite que c’est un habitué du lieu et son pote (Fabien Strobel). Ils attendent leur ami et futur marié (Romain Cadoret), un peu gauche, introverti qui est effaré du lieu de rendez-vous pour sa dernière journée de célibataire. Le lendemain, il épouse une femme des pays de l’Est qui ne parle pas sa langue et avec laquelle, on l’apprendra, il n’a jamais couché. Dans l’espoir de l’émoustiller un peu, les amis lui ont offert une journée d’enfer, qui commence dès neuf heures par le passage « initiatique » dans ce sex shop. Seulement voilà, rien ne se passe comme ils l’avaient prévu. La vendeuse/caissière tombe raide dingue amoureuse du futur marié, et vont connaître pour la première fois de leur vie de timide l’extase d’une relation très rapprochée. Tandis que le premier ami finit par avouer avoir couché avec la future mariée et le second laisse planer un doute éloquent, après s’être indigné de la trahison.

L’histoire dans le sex shop démarre au quart de tour avec la situation de départ et un fil narratif convenu lors d’un court conciliabule avec, on imagine, la participation de Vincent Ronsac le metteur en scène resté en coulisses. Pas à pas, elle avance avec un minimum de tension, du suspense, de révélations et un dénouement véritable. Le burlesque s’invite, les réactions des personnages se frottent aux situations épineuses. Les répliques fusent, étincellent, parfois s’évanouissent avant d’avoir fait leur effet, rarement s’étalent sans rebond, souvent débordent du cadre du rôle. C’est que les personnages auxquels les improvisateurs aguerris donnent vie s’évertuent à prendre les rênes, ce qui attise les fous rires et rend tellement vivant le spectacle. Mais il faut rester concentré, pour ne pas choir platement de ce fil narratif si indispensable à la qualité de la performance. Bien qu’entièrement dévoués au service du roi « Rire », les quatre mousquetaires inventifs et très expressifs affûtent le fil des jeux de mots éculés pour une cause plus grande : une histoire construite, cohérente, équilibrée et efficace… et très drôle. On rit, un peu, beaucoup, aux éclats, par vagues. Au point que certains reviennent assister à la naissance « presque » miraculeuse d’un autre « huis clos », et ainsi goûter à l’énergie communicative des comédiens de l’instant.

Nathalie Gendreau

Crédit photos Nathalie Gendreau.

Distribution

Avec : Aurelia Ciano, Audrey Faure, Julie Mori, Elise Roth, Sébastien Barat, Thierry Bilisko, Romain Cadoret, Vincent Ronsac, Fabien Strobel, Kevin Roussel.

Créateurs

Mise en scène : Vincent Ronsac

BAZ Productions 

Tous les mercredis à 21h30, jusqu’à fin juin 2018.

Au Théâtre de Dix heures, 36 Boulevard de Clichy, Paris 75018.

Durée : 1 heure.

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