“Chinchilla”, le miroir des sentiments

Temps de lecture : 2 min

 

THÉÂTRE & CO 

 

Avis de PrestaPlume ♥♥♥

 

Avec « Chinchilla », l’auteur Emmanuel Robert-Espalieu brosse avec l’humour grinçant qu’il affectionne le jardin intérieur de deux couples empêtrés dans une remise en question. C’est une comédie qui sarcle à coups de réparties légères et décalées les plates-bandes du drame qui s’échine à se tramer. Elle gratte les faux-semblants à coups de pourquoi et le réalisme des situations s’interpose en miroir du public qui s’interroge. Qu’est-on prêt à faire pour sa moitié quand on se retranche derrière la lassitude ? Jusqu’où son engagement peut-il se laisser aller ? Quatre comédiens le vivent avec force et subtilité, énergie et émotion, évoluant avec aisance grâce à une mise en scène minimaliste et futée de Bruno Banon. Deux couples s’opposent, le premier qui surnage dans la vie, tels des loosers (Jérémie Covillault et Lydia Cherton) et le second qui réussit tout ce qu’il entreprend (Roger Contebardo et Céline Perra)… Ils n’ont rien en commun si ce n’est l’amour qui s’étiole à force d’habitude et de confort.

Nos deux couples en mal de reconnaissance amoureuse se rencontrent au Swing, une boîte de nuit qui ne laisse pas de marbre. Ils ne se connaissent pas et pourtant ils ne sont pas prêts d’oublier le moment d’intimité qu’ils viennent poliment de partager. Revêtus de leur habit social, leur échange brûlant se mue en malaise. Les jours suivants, l’expérience en club d’échangistes va mettre à nu les sentiments des protagonistes, agissant comme un révélateur. Plus rien ne sera pareil, autant pour les deux habitués que pour les deux débutants. Les couples partent en exploration dans les sillons de leur cœur en quête de cet amour assoupi. Comment peut-on tout avoir et ne pas se sentir heureux ? Comment peut-on ne rien avoir et ne pas se donner la chance d’être heureux ? D’un côté, dix enfants, une très bonne situation, l’épanouissement personnel au top de sa forme. De l’autre, un chien écrasé, le chômage aux couleurs d’éternité, l’épanouissement personnel au ras des pâquerettes. Et, pour couronner le tout, un chinchilla qui menace de s’incruster.

Ainsi, l’herbe serait-elle plus verte chez le voisin ? Cette grande question frappe toujours à la porte d’un couple au moment où il s’y attend le moins… Non… Au moment où il s’y attend le plus ! N’est-ce pas soi qui provoque les situations ? L’idée du club échangiste, tout en étant savoureuse, est judicieuse. Quoi de mieux pour labourer son champ des possibles et des interdits ? Les deux couples se laissent aller à se dire les piques les plus blessantes tout en gardant un fond de tendresse. Les comédiens le jouent crescendo, en subtile gradation, qui rend crédible le coup de théâtre du dernier acte. La mise en scène n’est pas étrangère à l’atmosphère intimiste qui s’installe rapidement, comme ce miroir qui renvoie les monologues de leur propre solitude. Et que dire des dialogues de ces deux paires de voix qui se répondent en échos, tout en construisant leur histoire personnelle. L’enchâssement est juste parfait. Bruno Banon a su ensemencer l’harmonie des phrases, que les comédiens ont cueillie avec dextérité et jubilation. Tout est fin prêt pour laisser s’ébattre dans ce champ d’encore le chinchilla qui sommeille en nous !

 



« Chinchilla »
 
Auteur : Emmanuel Robert-Espalieu 
Metteur en scène : 
Bruno Banon 
Avec Lydia Cherton, Jérémie Covillault, Céline Perra et Roger Contebardo.
Musique : Yorfela
Lumières : Patrick Clitus
Décor : Mona Camille
Son : Frédo

Break a leg Productions

Au Théâtre des Feux de la Rampe, 34 rue Richer, Paris IXe

Séances les samedis et dimanches jusqu’au 31 décembre à 18 h 15.

Durée : 1 h 15.

 


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