“Betty’s Family”, une comédie explosive sur l’esprit de famille

Temps de lecture : 3 min

THÉÂTRE & CO 

Avis de PrestaPlume  ♥♥♥

Critique éclair

« Une soirée “presque” banale… » pour une famille presque lambda où se nouent et dénouent les crispations, les frustrations, les non-dits, les blessures et les rancœurs. « Betty’s Family », la nouvelle pièce à quatre mains d’Isabelle Rougerie et Fabrice Blind (au théâtre La Bruyère, à Paris), exploite le thème de la famille dans toutes ses configurations possibles et imaginables, tant les situations semblent s’inspirer du vécu. Quoi de plus explosif que des histoires de famille ? Avec des dialogues incisifs et percutants et une mise en scène tambour battant dirigé par Stéphane Bierry (lui-même acteur), le rythme de ce boulevard est fracassant et le comique de situation réjouissant. Le profil des personnages y contribue grandement. Véronique Genest (Clarisse) joue une mère poule psycho rigide qui entend sortir sa sœur Lisa, (Isabelle Rougerie) de ses échecs professionnels et amoureux. Patrick Zard’ (Régis) est un mari résigné, désinvolte et volage. Quant à Stéphane Bierry, il est Vincent, le meilleur ami de Lisa, un animateur de jeux de télévision préoccupé par son image vieillissante et la crainte d’être blackboulé. Ce soir-là, tous les quatre se retrouvent dans le petit appartement de Lisa, qui a oublié d’être charmant et n’est pas adapté aux réceptions. Surtout pour un repas d’anniversaire qui s’est transformé entre-temps en entretien professionnel ! Les esprits vont s’échauffer jusqu’à l’explosion de rires en série.

Résumé

C’est l’anniversaire de Lisa. Clarisse entend le fêter dignement, d’autant qu’elle a invité un couple de connaissances professionnelles dans le but de faire embaucher sa sœur. Maniaque et dirigiste, elle pourvoit à tout pour que le repas se déroule le mieux du monde et débouche sur un entretien concluant. Mais Lisa n’est pas très coopérative. Elle veut juste profiter de cette soirée qui est censée lui être consacrée. Ce repas, qui n’était déjà pas organisé dans les meilleures conditions, va alors tourner au vinaigre. Entre les plats sans gluten et les histoires d’argent, la soirée se colore d’amertume. Celle de Clarisse qui est lasse de tout gérer, à la fois l’inconstance et l’inconséquence de sa sœur, mais aussi l’absence de son mari, négociateur en vin itinérant ; celle de Lisa à qui sa sœur demande de participer aux frais de placement dans un Ehpad de leur mère, Betty, atteinte d’Alzheimer, alors qu’elle n’a pas un sou vaillant. Celle de Régis qui s’évade dans les bras d’une maîtresse pour échapper à la dictature domestique de sa femme et ainsi transgresser ses trop nombreux interdits. Enfin, celle de Vincent qui se voit doubler par une stagiaire qui a les faveurs du grand patron de la chaîne.

Pour approfondir

Quand toutes ces amertumes intimes s’additionnent, cela donne un moment de spectacle très agréable, servi par des comédiens qui tracent leur chemin sans baisse de régime, même lorsqu’un spectateur est pris d’un fou rire sonore ce soir-là ! Véronique Genest dégage une énergie incroyable qui maintient l’intensité. Isabelle Rougerie lui donne le change avec nuances. Stéphane Bierry campe à merveille l’ami égocentrique, qui n’écoute que lui. Quant à Patrick Zard’, ses répliques aussi débonnaires que cinglantes désamorcent les tensions, provoquant des situations hilarantes. Cette comédie virevoltante joue sur l’intensité et le relâchement des tensions. Les dialogues alternent entre l’énervement et la tempérance, dessinant un encéphalogramme en relief escarpé. Les répliques sont comme des lames de rasoir affûtées, à même de couper un rire en quatre. Les personnages sont tous attachants dans l’éventail de leurs émotions. Chacun se révèle à mesure de la libération de ces non-dits qui étouffent et gâchent l’existence. Cela ne se fera pas sans éclats ni mots durs. Il faudra l’évocation d’une rupture pour mettre à nue la sincérité et la tendresse, et donner une chance aux liens familiaux distendus de se resserrer. Avec cette écoute nouvelle, chacun pourra retrouver sa place, abandonnant le besoin d’empiéter sur celle de l’autre pour exister, séparément et dans la meilleure entente « possible » qu’il soit ! Enfin… on l’espère !

Nathalie Gendreau
©Laurencine Lot


Distribution

Avec : Véronique Genest, Isabelle Rougerie, Patrick Zard’ et Stéphane Bierry

 

Créateurs

Auteurs : Isabelle Rougerie et Fabrice Blind
Metteur en scène : Stéphane Bierry
Assistante à la mise en scène Elsa Saladin

Décors : Sean Dunbar
Lumières : Jacques Rouveyrollis, assisté de Jessica Duclos
Costumes : Virginie H.
Son  : Vincent Lustaud

Du mardi au samedi à 21 heures, plus le samedi à 16 h 45 jusqu’au 2 janvier 2021.

Au théâtre La Bruyère, 5 rue La Bruyère, Paris IXe.

Durée : 1 h 20

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