“À tout à l’heure”, Marie-France Mignal

Temps de lecture : 2 min

 

Extrait

“Il a raison Saint Augustin, il ne faut pas que je sois triste de t’avoir perdu mais reconnaissante de t’avoir connu.
C’est ce chemin-là qu’il me fallait, je reconnais sa justesse à ce qu’il m’a rendu heureuse.
Il serait dommage de ne percevoir de l’histoire que ce qui s’effondre et meurt et non ce qui a surgi et pris vie.
Tu me manques.
À tout à l’heure.

 

Avis de PrestaPlume ♥♥♥

 

À tout à l’heure” est un cri. Un journal intime court et intense. Une quête fervente de sens à la mort d’un être cher. Un concentré d’amour pour atténuer la perte. Marie-France Mignal connue comme actrice de théâtre, de cinéma et de télévision, mais aussi comme directrice du théâtre Saint-Georges, voue un amour immense à son mari disparu brusquement en 2012, le directeur de la photographie Alain Derobe. Avec ce récit poignant par sa brièveté et son acuité émotionnelle, elle raconte à son mari les conséquences de son inconcevable absence, en expurgeant d’une vie de couple bien remplie des instants fugaces que la disparition a élevé au rang du sacré. Le cheminement du deuil est douloureux, Marie-France Mignal le parcourt avec ce livre de larmes et de questions. Dans une sincérité émouvante, elle y pose, d’une plume délicate et si vivante, son chagrin, son manque et sa soudaine vulnérabilité.

On ne s’attend jamais à ce qu’une sieste se transforme en sommeil éternel. Marie-France Mignal était contente que son mari, infatigable travailleur, trouve un repos réparateur. Aussi quand son fils, parti le réveiller, revient lui annoncer qu’il est mort dans son sommeil, elle ne comprend pas. Quelques instants plus tôt, elle était entrée dans la chambre, avait pris la télécommande de la main de son mari assoupi pour éteindre le bourdonnement de la télévision. Et s’en était allée, comme elle était venue, sans inquiétude. Passé la stupeur hébétée, la raison de Marie-France bascule dans l’incompréhension, dans le déni et la multitude de gestes à produire pour diffuser l’épouvantable nouvelle.

Il faut gérer les appels de ceux qui ne sont pas au courant, qui évoquent un rendez-vous manqué, une promesse non tenue. Alors, il faut redire l’impensable “M. Derobe est décédé“, et entendre en retour des excuses confuses. Tout la ramène à leurs longues années de vie commune : ses vêtements dans l’armoire qu’il faut vider, cet appartement à Saint-Tropez qu’il faut vendre, cette maison à la campagne qu’il faut maintenant gérer soi-même, et surtout ses enfants et les brassées de souvenirs, de leur rencontre jusqu’au dernier repas avant la dernière sieste. Ils avaient trinqué : au futur, à la vie, à cet anodin “à tout à l’heure” que la mort a transformé en promesse. Avec ce livre, à son tour Marie-France Mignal lui adresse ce cri d’amour en porte-voix : “À tout à l’heure” !

Nathalie Gendreau

 

Editions Dacres, Collection “L’envers du décor de Dacres”, mars 2018, 80 pages, à 14 euros.

 

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