“1789 L’été de sang”, Frédéric Michelet

Temps de lecture : 3 min

 

Extrait

“Le sergent Grellier dévisagea le portraitiste effondré. Tenant la gamine pâle comme la mort sur ses genoux. Il ne peut s’empêcher de ressentir un sentiment de compassion pour la pauvre enfant dont les parents venaient d’être si impitoyablement questionnés. Bien que, à jouer avec le pouvoir et les intrigues, on pouvait s’y brûler ! D’autres jeunes filles qu’elle avaient des destins plus funestes et plus expéditifs. Cette enfant avait les mains lisses, elle n’avait assurément jamais porté de fagots, ni exécuté des ravaudages toute la sainte journée, comme ses propres enfants.” (page 53)

 

Avis de PrestaPlume ♥♥♥♥

 

Frédéric Michelet est un écrivain prolixe passionné d’Histoire. 1789, L’été de sang est son dernier roman inspiré de sa pièce 1789 secondes, portant sur la Révolution française. Comme dans sa création théâtrale de rue qui dure 1789 secondes précisément, son roman interroge les droits de l’homme et de la femme, l’abolition des privilèges, l’esprit de résistance. Mais il l’a construit autour d’une assertion peu commune sur l’événement qui a mis le feu aux poudres dans un Paris surchauffé un certain 14 juillet 1789. Et si les États généraux n’étaient pour rien dans l’histoire ? Et si la Révolution était le résultat d’un mouvement populaire en réaction au massacre du Faubourg-Saint-Antoine ? Et si, après tout, ce n’était qu’un complot visant à précipiter de vie à trépas une monarchie arrivée à bout de souffle ? C’est ce que se propose de nous narrer l’auteur, au rythme d’une enquête policière qui se déroule du 19 avril à la nuit du 4 août 1789, égrenant les 1789 secondes de la pièce en presque quatre cents pages intenses qui ne lâchent ni l’intensité ni le suspense.

Du jour au lendemain, le drame s’abat sur Joseph Beyraud, un jeune portraitiste talentueux qui vit chichement de ses créations. Sa sœur adorée et son beau-frère abhorré ont été massacrés dans leur chambre. Très vite, ce jeune veuf comprend que sa famille est impliquée dans une affaire qui échauffe tous les esprits. Ceux de la police du roi et ceux des comploteurs. Ce sont des millions en titres qui se sont envolés ! Le couple occis laisse une jeune enfant, Marie-Louise, capricieuse et méprisante, dont Joseph Beyraud ne veut guère s’encombrer. D’ailleurs, que sait-il du rôle d’un père ? Rien, si ce n’est qu’il prône des méthodes éducatives douces et non le fouet et les coups, comme sa nièce a eu à subir. Son cœur attendri finira par vaincre la raison. Il l’accueillera et fera tout pour la protéger contre ceux qui veulent la faire parler… coûte que coûte. Déjouant les traquenards, il continue d’avancer dans le dédale des secrets d’État, où il affronte la férocité des puissants, où il rencontre Lucile, une militante féministe dont il s’éprend, et où il s’affranchit de ses propres peurs pour faire progresser la cause d’un peuple qui a soif de liberté, d’égalité et de fraternité… mais qui a surtout faim.

1789, l’été de sang est une fiction historique qui se pare d’un réalisme troublant. Certes, cette impression est due à la galerie de personnages qui ont eu une réelle existence, comme Mirabeau ou Robespierre, la Reine de France ou le Duc d’Orléans, mais elle est due aussi au personnage principal qui rassemble à lui seul à ce peuple qui souffre, n’osant espérer mieux tout en étant en quête d’un meilleur. Joseph Beyraud est la quintessence de cette populace soumise puis agissante. Grâce à lui, cette Révolution en préparation nous est donnée à voir et à ressentir. Affamée de justice, elle engloutit les événements qui se succèdent. Joseph se débat, cherchant à réchapper du naufrage de l’Ancien régime qui lui paraît pourtant inéluctable, puis se révèle à lui-même dès qu’il se jette à cœur éperdu dans le courant des événements, dont la conséquence sera sanglante. L’été 1789 a tenu toutes ses promesses. Il fut bel et bien de sang… mais aussi d’amour pour Joseph, Lucile et Marie-Louise. Un trio bien attachant !

Nathalie Gendreau

 

Éditions Inspire, 9 novembre 2017, 396 pages, à 22,50 euros en version papier et 4,99 euros en version numérique.

 

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