“Discours d’investiture de la Présidente des États-Unis”, un plaidoyer ardent pour la survie de l’Homme

Temps de lecture : 3 min

 

THÉÂTRE & CO 

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Avis de PrestaPlume ♥♥♥

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Discours d'investiture de la présidente des États-Unis théâtre La croisée des cheminsLes politiques sont-ils des êtres adaptés à l’empathie, à l’élévation de la pensée qui dépasse l’asservissement au pouvoir, à la promotion d’une société harmonieuse ? C’est la question fondamentalement altruiste qui se meut dans cet espace de liberté d’expression intimiste qu’est le Théâtre La Croisée des chemins. Un théâtre confidentiel au nom prédestiné où se rencontrent les courants de pensée à l’ouverture infinie sur le monde. Le spectacle « Discours d’investiture de la Présidente des États-Unis », qui s’y installe jusqu’au 6 mars, est un texte engagé de Roger Lombardot. L’auteur y exhorte l’homme à se responsabiliser pour sortir de la violence et trouver la paix qui est « une nécessité biologique ». Le monde n’est-il pas un tout constitué de milliards d’êtres interdépendants ? Ce monologue magnifique et profond qui parle au cœur et remue les tripes est servi par une solennité empreinte de délicatesse de la comédienne Claudine Guittet. En donnant à voir l’intimité de cette présidente se préparant à un moment d’une gravité exaltante, la metteuse en scène Chantal Péninon parvient à créer une distorsion du temps et de l’espace qui ranime les horreurs du siècle passé pour conjurer leur répétition historique. Et ouvrir un nouveau chapitre de la conscience universelle.

Enveloppée dans une robe de chambre, bandeau rouge dans les cheveux gris, la présidente promène ses pensées dans son appartement. Le moment est d’importance, bientôt elle prononcera son discours d’investiture. Première femme Présidente des États-Unis, elle mesure l’ampleur de la charge et s’interroge sur l’origine de sa conscience du monde et de la politique. Tout en savourant sa tasse de thé, elle remonte à son enfance, à l’émerveillement de son premier film muet, ce temps révolu où tout était dans le regard. A-t-elle quelque chose à dire ? A-t-elle le droit de voler ce temps précieux à ceux qui l’écoutent ? Pourtant, elle a passé plusieurs années de pur bonheur à écouter ses voisins, Jim et Margareta, un couple charmant, uni par l’amour vrai. Surtout Jim, un colosse aux souvenirs fragiles.

Ancien professeur d’histoire, Jim s’était mis en tête de lui raconter la vraie Histoire, celle qu’on n’enseigne pas aux écoliers, celle qui saigne, qui a peur et fauche les destins. Depuis la Grande Guerre et la déshumanisation des soldats, jusqu’à la montée du fascisme et l’Holocauste. Alors que la 5esymphonie de Malher fait résonner ces heures sombres dans la pièce, la Présidente se souvient de son frère cadet disparu pendant la guerre du Vietnam, de sa lente dépression avant de se réveiller à la vie pour reprendre son destin en main. Elle devient biologiste et milite en politique. Elle réfute « la phrase obscène » qui condamne l’homme à être viscéralement mauvais. Pour elle, l’homme a le choix d’être bon ou mauvais. Un choix qui doit se faire en toute conscience, guidé par « un gouvernement visionnaire, respectueux de l’espèce humaine ».

Chemin faisant, les souvenirs s’ordonnent dans une réflexion constructive, démonstrative, signifiante. Alors qu’ils se rapprochent du présent à pas feutrés, la présidente quitte ses chaussettes molletonnées, enfile son pantalon, laisse choir à terre sa robe de chambre marron à poids blancs, comme on se débarrasse d’une vilaine peau. Elle effeuille peu à peu le passé, en conscience, méthodiquement. La voix de Claudine Guittet d’une douceur infinie a des accents volontaires qui portent la fermeté à la hauteur de la finesse. Alors que la bourgeoise d’intérieur se transfigure en Présidente distinguée, le monologue nostalgique se façonne dans la conviction d’un monde meilleur qui abandonnerait « ses réflexes guerriers » et qui acquerrait « une forme de sagesse politique ». Un système qui repose sur la responsabilité de chacun, n’est-ce pas la forme la plus active de la liberté ? déclare-t-elle, alors qu’elle conclut son discours innovant sous la lumière crue du projecteur. Avec cette recherche du meilleur de soi, le pouvoir de créer le bonheur sera entre toutes les mains ! La présidente en est certaine. Ébloui par la force du propos et la performance de la comédienne, qui navigue entre la trivialité du quotidien et la pertinence des réflexions, le public se surprend à rêver de l’avènement d’une telle conscience politique.

Texte et photos Nathalie Gendreau

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Discours d’investiture de la Présidente des États-Unis

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Distribution

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Avec : Claudine Guittet.

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Créateurs

Auteurs :  Roger Lombardot

Mise en scène : Chantal Péninon

Compagnie Vue sur Scène
 


Tous les mercredis jusqu’au 6 mars 2019, à 21 h 30.


Au Théâtre La Croisée des Chemins, 43 rue Mathurin Régnier, Paris XVIe.


Durée : 1h15.

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