“Non à l’argent !”, une comédie 100 % gagnante

Temps de lecture : 3 min

   

THÉÂTRE & CO 

Avis de PrestaPlume ♥♥♥♥

Comment peut-on dire non au pactole ? L’auteure Flavia Coste entend le démontrer au Théâtre des Variétés avec sa nouvelle comédie, à la fois psychologique et délirante, Non à l’argent ! C’est à coups de réparties cinglantes, cruelles et savoureusement drôles que l’on découvre combien le risque est grand de refuser la fortune au nom de l’amour. Les comédiens Claire Nadeau (Rose), Julie De Bona (Claire) et Philippe Lelièvre (Étienne) emmènent leur personnage respectif dans un tourbillon de folie qui évacue toute retenue, toute pudeur. Le sigle de l’euro au fond des yeux, ils règlent son compte à Richard (Pascal Légitimus), l’heureux gagnant qui a osé les faire rêver avant de les précipiter dans la sidération. La mise en scène rythmée d’Anouche Setbon fait progresser par palier ces relations de couple, filiale et amicale qui se fissurent avant de s’effondrer. Elle offre ainsi aux comédiens tout l’espace nécessaire pour exprimer la gradation de leur colère fantastique et jubilatoire.

C’était trop. C’était des millions. C’était 162 millions d’euros, gagnés bêtement au Loto, sans vraiment le chercher, juste pour perpétuer le souvenir d’un père, grand joueur devant l’éternel. Richard a tu la bonne nouvelle, le temps de s’y faire, d’analyser les conséquences… et de décider de renoncer à ce cadeau tombé du ciel par crainte qu’il devienne son pire cauchemar. Il n’imagine pas un seul instant qu’en le divulguant à ses proches, il participe lui-même à sa faillite personnelle. Qui s’aviserait de refuser une telle somme quand il y a tellement de misère dans le monde, mais surtout tellement de besoins autour de lui ? Richard au grand cœur ne l’a pas perçu, il est trop ébloui par le panache de son geste. A-t-il seulement les moyens de s’improviser grand seigneur quand il a le devoir de rendre heureux sa femme, sa mère et son ami… mais aussi patron qui s’est ruiné pour lui ? Mais voilà, il est persuadé que les millions vont anéantir l’équilibre de sa vie, qu’il ne veut surtout pas perturber. Sauf que Rose, Claire et Étienne sont mis devant le fait accompli ! Et ils n’aiment pas ça du tout, mais pas du tout ! À bout d’arguments et de cajoleries, ils ne voient qu’une solution… oui à l’argent, quoi qu’il en coûte !

La comédie de Flavia Coste est audacieuse dans son écriture, car renoncer à la richesse peut sembler une aberration en soi, quasi indéfendable. Mais, soutenus par des ressorts psychologiques, les personnages gagnent en consistance et la fiction en crédibilité. Les réparties assassines fusent au travers du salon et font voler en éclats les motivations de Richard, dont l’apparent sacrifice au nom de l’amour n’exprime que la peur égoïste d’être abandonné. La mise en scène d’Anouche Setbon modère le mélodrame qui se dessine en poussant jusqu’auboutisme le caractère des personnages. Et là, le masque du politiquement correct se déchire. Lorsque Richard développe ses théories polies à l’angélisme, son exaltation idéaliste contamine Rose, Claire et Étienne jusqu’à leur faire perdre toute mesure. La stupeur change de camp, il a eu le temps de recharger ses batteries.

Alors un transvasement progressif des émotions s’opère entre les personnages jusqu’au point de rupture qui noie irrémédiablement la psychologie dans la fantaisie et le pur divertissement ! Julie De Bona métamorphose avec un plaisir certain l’aimable prof de philo en furie vengeresse. Claire Nadeau donne à la mère aimante et révoltée un ton pinçant qui ravit d’indignation ! Avec Philippe Lelièvre, l’envie de meurtre est marquée du sceau de la justice ! Quant à Pascal Légitimus, il revêt la robe d’un avocat qui aurait gardé toutes ses illusions sur le monde et le plaide avec conviction jusqu’à ce que mort s’ensuive ! Et moi qui pensais que plaie d’argent n’était pas mortelle !

Crédit Photos : Fabienne Rappeneau



« Non à l’argent ! »

Distribution
Avec : Claire Nadeau, Pascal Légitimus, Julie de Bona, Philippe Lelièvre.

Créateurs
Auteur : Flavia Coste
Mise en scène : Anouche Setbon
Scénographie : Sophie Jacob
Collaboration artistique : Sophie Gubri

Lumières : Jean-Luc Chanonat
Musique : Michel Winogradoff
Décor : Sophie Jacob
Costumes : Juliette Chanaud

Du mercredi au samedi à 20h30 et le samedi et dimanche à 16h30, jusqu’au 7 janvier 2018.

Au Théâtre des Variétés, 7 Boulevard Montmartre, Paris 75002.

Durée : 1h30.


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