“La plus secrète mémoire des hommes”, Mohamed Mbougar Sarr
Temps de lecture : 3 min « Un grand livre ne parle jamais que de rien, et pourtant, tout y est. » Cette réflexion de l’ami du narrateur Diégane Latyr Faye dans « La plus secrète mémoire des hommes » (coédition Philippe Rey/Jimsaan) éclaire à elle seule l’ambition de ce flamboyant roman initiatique. Mohamed Mbougar Sarr annonce donc la couleur, met ses influences littéraires et tout son être sur table et remporte la mise de la notoriété. La trame naît d’un écrivain malien, Yambo Ouologuem, qui a été accusé de plagiat après avoir reçu le prix Renaudot en 1968 pour « Le Devoir de violence ». Dans son quatrième ouvrage, le lauréat du prix Goncourt 2021 transpose ce fait via le parcours d’un jeune auteur fictif, T.C. Elimane, surnommé le « Rimbaud nègre » à la parution de son ouvrage « Le labyrinthe de l’inhumain » en 1939 et conspué pour plagiat. Fasciné, Diégane Latyr Faye entreprend de retracer la vie de cet écrivain fantôme, marchant dans ses pas aux quatre coins du monde, de piste en piste. Au fil des pages et du temps rebroussé, Mohamed Mbougar Sarr nous immerge dans les tourmentes historiques du XXe siècle. Traversé par une force évocatrice, soutenu par une prose nerveuse et un suspense savamment entretenu, « La plus secrète mémoire des hommes » est tel un fil tendu au-dessus d’un précipice où l’audace et l’imagination exultent, battent d’un même cœur. Ce passionnant plaidoyer pour la littérature africaine et la reconnaissance des écrivains africain est aussi un bel hommage à l’essence même d’écrire, à l’humanité, à la vie… à la naissance d’une œuvre.